Speaker ou Maître de Cérémonie, le métier qui sublime un événement

S01E05 – rencontre avec Vincent Leclerc

S01E05 – Vincent Leclerc : Speaker ou Maître de Cérémonie, le métier qui sublime un événement

 

Une rencontre inspirante ! 

 

Dans cet épisode, nous recevons Vincent Leclerc, un homme de micro depuis plus de 20 ans. Venu tout droit du Québec, il a fait ses écoles notamment dans les centres de vacances de l’UCPA. Il est aujourd’hui un Maitre de Cérémonie francophone et anglophone, qui intervient sur tous les types d’événements.

À travers cet échange, on apprend à découvrir son parcours, il nous donne également des conseils pour la prise de parole en public et nous précise sa vision de l’avenir de l’IA pour le métier de MC.

 

 

Transcription de l’épisode

 

N.G : Bonjour à toutes et à tous, bienvenue sur le podcast Good Morning Event. Aujourd’hui, je suis avec Vincent. Vincent, bonjour.

 

V.L : Salut Nico.

 

N.G : Tu t’appelles Vincent Leclerc et tu es notre invité aujourd’hui parce qu’on va parler de ton parcours et notamment d’un personnage souvent central sur les événements, le MC ou le speaker.

 

V.L : Tout à fait.

 

N.G : Alors Vincent, déjà, on l’a peut-être déjà débusqué à ton accent. Tu parles parfaitement français, mais tu n’es pas français. D’où viens-tu ?

 

V.L : Moi, je suis québécois. Je suis québécois. Ça fait une trentaine d’années, ça va faire une trentaine d’années que j’habite en France en 2025. J’ai eu l’occasion de passer l’océan pour venir redécouvrir mon métier d’animateur de MC que j’exerçais déjà au Canada. J’ai collé en France. Au début, c’était plus un plaisir au départ. de découvrir l’Europe. Au final, j’ai trouvé l’amour et on s’est installés.

 

N.G : Très bon choix, la France. Alors, tu démarres dans le métier en 1989. Ça ne nous rajeunit pas, ça fait un petit moment.

 

V.L : Oui, oui. En réalité, c’est 1989, la partie animation. C’est un petit peu plus tôt que ça. En 87-88, je commençais à être DJ. Je prenais un petit peu le micro dans le cadre des booms à l’école, les MJC, ces choses-là. Il s’est produit quelque chose d’un peu rigolo. C’est qu’un jour, en 89, j’ai 17 ans, je suis à l’école, ce que nous on appelle le cégep. Pour vous, c’est juste après le bac. Si tu veux, c’est entre le bac et l’université. Nous, on a le cégep, Collège d’enseignement général et professionnel. Il y a une radio étudiante qui a été squattée par un de mes amis, un de mes collègues, un de mes très, très proches amis, qui est encore aujourd’hui, qui me dit, Vincent, moi, je vais avoir une émission à la radio étudiante du cégep. Est-ce que ça t’intéresse d’y participer ? Je dis, Hé, je suis DJ. Ça va être super cool. Je vais faire de la radio. Ça va bien se passer. Bien, je ne vais pas dire pas mal penser, parce que c’est de la radio étudiante, mais ça a été un vrai choc pour moi parce que c’est là où j’ai démarré le micro, vraiment. Comme on fait aujourd’hui avec ce podcast, je me suis retrouvé dans un studio avec un micro, avec des platines vinyles à l’époque, et pas savoir quoi dire dans le micro, pas savoir quoi faire. Allumer le micro, essayer de parler et être bloqué sans voix. Et là, je me suis dit, OK, j’ai un métier à apprendre, j’ai quelque chose à faire. Et c’est là où l’aventure a démarré pour moi. Donc, j’ai commencé à faire de l’animation micro à la radio, qui m’a amené à faire après ça des événements, des choses comme ça. Puis là, ça s’est déroulé par la suite.

 

N.G : Et donc, tu nous disais, c’est un peu par amour que tu te retrouves en France.

 

V.L : Oui.

 

N.G : On est en 1996, ce coup-ci.

 

V.L : 96, oui, 96, exactement, dans le cadre de mes études. J’ai fait une formation de technicien d’intervention loisirs, c’est une formation d’animateur, mais pas d’animateur micro ou qu’on pourrait parler animateur centre de vacances, ces choses-là. C’était animateur loisir, pour travailler dans les mairies, travailler dans le tourisme, ces choses-là. Donc c’était de l’organisation et j’avais un stage à faire obligatoire en dehors du Québec qui devait initialement durer trois semaines et qui, cette année-là par hasard, m’a permis de venir 11 semaines en France. Et c’est en 95, d’ailleurs, parce que j’étais en train de réfléchir en même temps qu’on parle. C’est en 1995, j’ai fait mon stage. Je suis parti faire mon stage en France, dans le sud de la France, à Saint-Cyprien, à l’UCPA, les centres de vacances. Et là, c’est ce que je disais au tout début, j’ai redécouvert un métier que je connaissais, que je pensais connaître. J’ai trouvé une nouvelle façon de faire, des nouvelles dynamiques, des nouvelles organisations, une nouvelle culture. Et quand je suis reparti au Québec faire de mes études, j’ai renvoyé deux CV à la fin de mes études. Un dans une entreprise au Québec, je travaillais dans des centres de vacances comme animateur, et un en France à l’UCPA. J’ai fait l’entretien au Québec, l’UCPA m’a rappelé, le choix était fait tout de suite. Au départ, je partais pour une saison ou deux, finalement, j’ai collé, comme je disais, j’ai décidé de passer le pas. Et depuis 1996, bien, j’ai continué ce métier, développé ce métier de MC, d’animateur, sous toutes ses formes, vraiment toutes ses formes, et c’est ça qui est extraordinaire.

 

N.G : Et l’UCPA d’ailleurs, on y reviendra un petit peu après, mais on s’est rencontrés, l’UCPA, où tu as fait tes gammes, dans le sens d’animateur, de responsable d’animation, puis ensuite de formateur des animateurs pour les différents centres, c’est là aussi où progressivement tu as pu prendre de l’expérience et travailler un petit peu sur tout ce métier justement du micro. Comment s’améliorer et comment former les autres à être à l’aise avec un micro ?

 

V.L : Exactement, la prise de parole en public. J’ai commencé en 1995 stagiaire animateur. Je suis sorti en 2012, fin 2012, comme référent national de l’animation. J’ai passé par toutes les étapes et j’ai fait beaucoup, beaucoup de formation, de recrutement de formation d’animateur. Comment parler dans un micro ? Comment avoir de l’impact ? Quand on parle face à un public, comment être capable d’attirer l’attention ? Comment éviter de devenir le tonton Jean-Paul dans le mariage, qui des fois va devenir un petit peu lourd, ces choses-là ? Comment faire en sorte que, des fois, pas parler va avoir plus d’impact que de parler ? Comprendre qu’un micro, c’est quelque chose d’extraordinaire et que ça amplifie tout, les bonnes choses comme les mauvaises. Le micro peut être aussi une arme face à un public et peut lever les foules. quand on en a besoin. Donc, tout ça, moi, j’ai l’air, j’ai envie de dire, peut-être par mes années de jeune DJ, quand j’étais dans les années 80, fin des années 80, DJ, je l’ai découvert en regardant mes pairs, qui, au départ, comme dans n’importe quel métier, on apprend avec les gens. Donc, j’observais, j’écoutais beaucoup, je regardais, je participais. Une fois de temps en temps, je prenais le micro. J’appréciais les choses en disant, OK, comment là, ça a fonctionné ? Pourquoi là, ça n’a pas fonctionné ? Et tranquillement, j’ai interprété tout ça, j’ai monté des formations, entre autres à l’UCP et pas que. J’ai eu la chance et l’opportunité, les opportunités de pouvoir proposer ce type d’outil qu’est la prise de parole en public à beaucoup de gens, que ce soit en interne sur des personnes qui avaient des conférences, des séminaires, des réunions, des choses comme ça. Il y en avait vraiment pour tout le monde. Donc, la prise de parole en public, pour moi, c’est une vraie passion. qui m’amenait à faire plein de choses comme la radio, mais on en parlera peut-être plus tard. C’est sûrement dans les questions.

 

N.G : D’ailleurs, j’aimerais que tu me parles d’un événement que seuls les plus anciens d’entre nous peuvent connaître, qui est un événement UCPA qui s’appelait le Pure Mix, qui avait lieu à Bercy à l’époque, aujourd’hui à Core Hotel Arena, mais qui s’appelait à l’époque encore Bercy. 10 000 personnes, 10 000 jeunes dans cet espace. Raconte-nous ce qui se passait et raconte-nous ce que toi, tu y faisais.

 

V.L : Moi, ce que j’y faisais, j’ai eu la chance de faire de l’animation sur scène avec les plus grands, donc David Guetta, Bob Sinclair, et ainsi de suite, présenter ces DJ de renom dans un environnement mythique comme l’Accor Arena Bercy à l’époque, où on avait, quand je dis on parce que j’étais un petit peu dans l’organisation au départ, c’était pas moi qui étais à l’initiative du projet, c’est le responsable marketing de l’UCPA, à l’époque, avait eu cette idée folle de créer une ambiance qu’on appelle le Pure Mix pour permettre de mixer le sport, la musique et l’animation dans un seul et même événement. Donc, un événement qui regroupait toutes les catégories d’âge parce que l’UCPA, à l’époque, c’était 18-39 ans. Il y avait aussi pour les jeunes, mais là, on était sur du 18-39. C’était de faire la fête, montrer qu’on savait faire la fête à l’UCPA. Donc, un événement qui démarrait à 20h, qui finissait à 5h du matin, dans lequel on investissait l’intégralité de Bercy. C’est-à-dire autant la grande salle principale, les coursives, plus la salle Marcel-Serdin qui était annexe, dans laquelle il y avait un skatepark gigantesque. Bref, on transformait l’environnement en un grand plateau musical, dansant et sportif. Donc, pendant que les gens dansaient sur David Guetta, en face, il y a des gens qui faisaient du wakeboard. Sur le côté, il y en a qui faisaient de l’escalade. Et derrière nous, il y a des gens qui traversaient en tyrolienne tout Bercy. Et à l’autre extrémité, il y en a qui faisaient de l’escalade de glace sur des vrais panneaux de glace. C’était complètement fou. Et moi, dans cette organisation-là, j’avais la gestion de l’animation micro sur scène, donc la scène principale, montée sur scène, 10 000 personnes, ambiancées. Bon, quand on est sur un set, par exemple, avec un gars comme Bob Sinclair ou Laurent Wolff ou les Superman Lovers, une fois que les personnes ont été présentées, Il n’y a personne qui parle, je veux dire, c’est eux les artistes. Ce n’est pas un karaoké, ce n’est pas une soirée, ce n’est pas comme un mariage. Par contre, il y a toute la partie justement mise en forme pour mettre en valeur ces artistes et faire monter la sauce. Moi, je me rappellerai toujours d’un moment qui est unique au Pur Mix, c’est lorsqu’on a fêté les 40 ans de l’UCPA, qu’on a dévoilé avec le fameux gros gâteau géant qui avait été fait pour l’occasion, qui avait été transporté avec les badoukadas et tout ça. Et juste avant que David Guetta monte sur scène à minuit, où là, on a fait… Moi, je me rappellerai toujours, c’est dur à exprimer, imaginez un environnement où il y a 10, voire même, je pense qu’on avait même dépassé la jauge de mémoire, parce que la sécurité, je me rappelle, on avait fait un gros pataquès par rapport à ça, plus de 12 000 personnes s’étaient réunies dans la salle. Les lumières s’éteignent, j’avais un spot qui m’éclairait, j’allais annoncer l’anniversaire de l’UCPA, la Batucada et ainsi de suite, David Guetta arrivait derrière, les gens étaient… Il n’y avait plus de sang dans les veines de qui que ce soit, c’était que de l’adrénaline. C’était extraordinaire. Et c’est là où, en tant qu’animateur, MC, parce que c’est le sujet d’aujourd’hui, être capable de jouer avec ça, de faire monter la sauce au bon moment, à la seconde, pour que ça explose, pour qu’il y ait une énergie. C’est un moment extraordinaire. Le Pur Mix, déjà, je remercie tous les gens du UCPA qui nous écoutent. Si vous faisiez partie de la bande qui a organisé tout ça, de m’avoir donné cette occasion de vivre ces moments qui étaient extraordinaires. Et pour ceux qui l’ont vécu, je pense que tout le monde s’en souvient. Ça a été des années phénoménales.

 

N.G : Alors moi, je ne l’ai pas vécu, mais effectivement, j’en ai beaucoup entendu parler.

 

V.L : C’est incroyable.

 

N.G : Si on fait un petit saut dans le temps, tu as été aussi MC à la télévision notamment. Alors tu as été chroniqueur. Et j’aimerais bien qu’on s’arrête sur une expérience où là, tu étais MC. C’était un intervilles international qui s’est tourné à Budapest avec une diffusion en 2014. Là, tu as été MC et pour le coup, non pas francophone, mais anglophone, puisque tu étais l’hoste pour la diffusion américaine de cette émission.

 

V.L : Exactement. En gros, l’histoire est un peu rigolote. Pour mettre dans le contexte, je suis assis à mon bureau, le téléphone sonne, c’est la Mistral Prod qui, à l’époque, avait la licence d’intervilles international, qui cherchait à avoir une équipe nord-américaine parce que les Russes, qui faisaient partie de l’événement, ne viendraient pas participer à Budapest si l’Amérique du Nord n’était pas représentée. Parce que pour eux, en Russie, intervilles international, c’est un des programmes les plus importants en Russie. C’est-à-dire que c’est un peu comme, je ne sais pas si on pourrait comparer ça à Koh-Lantan, il y a vraiment une cote d’écoute complètement folle. Et cette rivalité Amérique et Russe devait être présente. Les États-Unis ne s’étaient pas prononcés pour venir participer, donc ils cherchaient une équipe nord-américaine. Donc, ils m’avaient appelé parce que je connaissais beaucoup de Québécois à Paris pour faire cette émission-là. Et il s’est avéré qu’ils avaient une équipe, au final, pour faire une histoire courte, une équipe brésilienne. Ils ont eu quelques Américains qui ont participé, ensuite. Et moi, je me suis retrouvé dans cet univers-là complètement par hasard pour animer, être l’animateur des équipes des Amériques. Et en effet, en anglais, parce que les six pays, donc il y avait la Russie, il y avait la Hongrie, il y avait la France, bien sûr, qui était là, l’Égypte et le sixième, c’était l’Indonésie, qui étaient présentes. Donc ces six pays-là avaient chacun leur animateur et pour l’équipe des Amériques, comme personne n’avait acheté le programme en Amérique du Nord pour le rediffuser, il n’y a pas d’équipe de production qui était venue. Donc Mistral Prod m’a embauché à leurs frais pour qu’il y ait une équité, un équilibre, pour qu’en début d’émission, en fin d’émission, on soit les six animateurs représentant les six pays. Et moi, je gravitais. Fait que pendant 14 jours, 10 jours de tournage, 14 jours sur Budapest, j’avais un laissé-passer sur le plateau. Je pouvais aller où je voulais, quand je voulais, tant que je n’étais pas dans le champ de caméra, si je n’avais pas besoin d’y être. Et l’animation, bien là, c’est un autre défi. Parce que là, on est sur un plateau. On a une équipe de tournage, on a une équipe de Brésiliens et de personnes qui vont participer à une équipe, à des épreuves complètement folles. Je ne sais pas si vous avez eu l’occasion. Tu as déjà été sur un plateau d’intervilles ?

 

N.G : Non, malheureusement, non.

 

V.L : Là, j’en parle. Je prends une seconde. On regarde le truc, on se dit, ah, c’est drôle. C’est hyper dangereux. C’est un truc, quand je dis dangereux, attention, c’est sécurisé. Mais ce que je veux dire, c’est qu’on ne se rend pas compte le niveau d’engagement des personnes qui montent sur le ring pour n’importe quelle épreuve. Ça fait rire quand t’es assis dans ton canapé, mais quand t’es sur le plateau, tu mesures le truc, c’est complètement fou. Et pour motiver les troupes, parce que l’animation se faisait pour la télé, mais l’animation se faisait aussi backstage. Moi, j’ai des vidéos sur mon YouTube où j’ai fait un genre de lip-dub avec toutes les personnes, les 300 personnes qui étaient là. C’était tous les pays, les équipes de prod, ainsi de suite, pour motiver les troupes. Parce qu’on avait des blessés, tout le monde était fatigué. Donc, c’est toute une animation. L’animation ne s’arrête pas juste au mec qui a le micro face caméra. Il y a toute l’animation derrière. Et ça, pour moi, ça a été un des moments les plus magiques de ma carrière d’animateur, qui a été courte à la télé, mais que j’ai pu vivre.

 

N.G : Alors, courte à la télé, mais qui a continué sur pas mal de grands événements. Je te vois tous les ans un petit peu sur des événements récurrents, comme un gros événement chocolat sur Lyon.

 

V.L : Oui, Paris.

 

N.G : Pardis pardon, le Salon du chocolat Paris ou dans les Alpes, du coup, sur un événement VTT aussi où je te vois chaque année.

 

V.L : Oui, tout à fait.

 

N.G : Raconte-nous un peu cette récurrence, cette fête aussi de revenir d’année après année sur un événement comme ça en tant que MC. Comment est-ce qu’on se renouvelle ? Quelle est la fidélité aussi ? C’est quoi tout ça ?

 

V.L : Là, il y a quelque chose de ce que tu viens de dire est très important, c’est le côté comment se renouveler et comment on arrive à avoir quelque chose de récurrent en tant que MC. Je pense que pour toutes les personnes qui font ce métier ou qui veulent se lancer là-dedans, sachez une chose, il faut être vous-même. Je m’explique pourquoi je dis ça, c’est très important. J’ai la chance depuis 2009, en réalité, que je bosse avec le Salon du chocolat. J’ai eu la chance de 2009 à 2015 à faire les World Chocolate Masters. Donc, c’était à toutes les deux ans une compétition internationale sur les maîtres chocolatiers. Entre deux, je faisais les finales françaises et anglaises. Donc, j’allais en Angleterre et en France une année sur deux pour sélectionner les candidats qui allaient participer au final. Ensuite, j’ai travaillé avec la Confédération, encore aujourd’hui, Confédération française des artisans pâtissiers chocolatiers confiseur-traiteur, et glacier d’ailleurs, où là j’anime le trophée international de la pâtisserie française. Pourquoi chaque année ils prennent le même ? Parce qu’ils cherchent une personne qui va avoir une régularité, un personnage qui va être en mesure d’amener un message clair et qui va s’intéresser au sujet et qui va s’organiser pour que… C’est vraiment ce côté journalistique, je vais dire, c’est MC et en même temps journaliste. C’est être capable de se mettre à la place du chaland, de la personne qui passe et qui n’y comprend rien ou qui vient comme spectateur. Donc, être capable de se mettre à la place de cette personne-là pour poser les bonnes questions aux professionnels, faire rêver les gens qui sont les passants, les spectateurs, et mettre en valeur les candidats, les sportifs, les athlètes. Tu parlais des événements de VTT. J’ai eu la chance pendant cinq ans, parce que ça a changé, le format a changé, ça fait qu’ils ont complètement changé l’équipe. C’était les Crankworx que j’ai animés, qui était une compétition internationale de VTT de type Red Bull, où les personnes font des choses… En gros, leur relation à la gravité n’est pas la même que moi sur la planète Terre. Il y a des choses que je ne peux pas comprendre, puis je pense que personne ne peut les comprendre. Mais j’ai eu la chance de vivre là-dessus. Et je me suis retrouvé là-bas par hasard parce que j’avais animé un festival pendant trois ans à Grenoble, de la glisse, et ça a démarré où les gens des Deux-Alpes m’avaient vu sur scène parce que je m’intéresse aux gens, parce que je mets en valeur les artistes qui montaient sur scène, parce que toutes les personnes que j’interviewais, je m’organisais pour qu’elles soient mises en avant. C’est pas moi la star. Et ça, pour moi, je pense que c’est un des gros défauts de certains MC. Et s’il y en a que je connais qui m’écoutent en ce moment. Ils peuvent se reconnaître. Et les gars, les filles, on n’est pas des stars. On est là pour mettre en valeur les gens et faire en sorte que ce soit eux les stars. Et à partir du moment où on fait ça, d’une année sur l’autre, on va vous rappeler. Parce que c’est vous qui arrivez justement à trouver le moyen de faire passer des émotions grâce aux personnes qui sont en avant de vous. Pas grâce à vous. Vous, vous êtes là, vous êtes un accessoire. Un MC, pour moi, c’est un accessoire.

 

N.G : Est-ce que c’est un peu aussi une sorte de signature sonore sur un événement ? C’est-à-dire que ça peut être identifiable, on reconnaît, on y est allé, on y est déjà allé. On retrouve tout de suite un décor, mais aussi comme un jingle, le fait d’entendre une voix qui nous est familière, on sait où on est.

 

V.L : Très, très bon exemple et je vais donner une anecdote. J’ai eu la chance d’animer le Tima, le tournoi international des mini-madidastes, tournoi de judo international dans le sud de la France. Et la dernière édition que j’ai faite, juste après la COVID, c’est ça. Après ça, ça a été reporté, ils l’ont déplacé. Tu parles d’une voix, c’est très drôle. Je ne connais rien au judo. On m’a demandé d’y aller. Il y a beaucoup, beaucoup d’événements où je vais, où je n’y connais que dalle. Sauf que je m’informe. Je m’instruis. Je ne deviendrai pas un professionnel du judo. Je ne connais pas les mouvements, ces choses-là. Par contre, je vais poser les bonnes questions aux bonnes personnes en interview, en animation, pour me permettre d’apprendre,toujours curieux, de devenir plus performant et en même temps mettre en valeur les gens. Et sur le tima, la personne qui était responsable du stand Adidas, sponsor majeur de l’événement, c’est le tournoi Adidas, un jeune de 27-28 ans qui vient me voir et me dit, excusez-moi monsieur, l’anecdote me fait mourir de rire, est-ce que ça vous est déjà arrivé d’animer le troc et puce de Torcy dans le 77, région parisienne ? Je dis oui, bien sûr, ça fait plus de 10-12 ans que j’anime le troc et puce à toutes les années. Il dit, écoutez, j’ai grandi avec votre voix. Et là, quand on parle du Troc-et-Puce de Torcy, j’en parle, ça l’est à tous mes amis de Torcy, il y a plus de, je crois, 6 ou 7 kilomètres linéaires dans les rues de Torcy. Donc, c’est énorme. Je ne peux pas aller dans toutes les rues, ce n’est pas possible. Donc, moi, je suis cantonné à un endroit à cause du micro. Par contre, les gens m’entendent partout. Et lui m’a reconnu sur un autre événement. Bon, je suis Québécois, mon accent marque, bien sûr. Mais en effet, c’est extrêmement… Si la voix colle à l’événement, c’est sûr que ça va fonctionner. Je dirais, la voix va coller à partir du moment, encore une fois, où on est en mesure de ne pas être trop présent. C’est là l’équilibre à faire. Quand on regarde, je ne sais pas moi, des émissions comme The Voice, ces choses-là, puis qu’on écoute Nikos parler. « Bonjour les petits loups ! » Tu l’entends parler avec sa grosse voix. Si tu l’entends à la radio, tu sais que c’est Nikos, il y a une ambiance, tu connais le personnage, et tu as envie de l’écouter pour ce qu’il est comme. personne. Parce qu’il va mettre en valeur les gens. Et Nikos, pour moi, est un très bon exemple. J’ai jamais eu l’occasion de le rencontrer, mais je trouve que c’est un mec assez sympathique quand il parle au micro. Même si c’est une star, il prend les gens et il les met en valeur. Après, vrai, pas vrai, c’est pas ça. Mais c’est vraiment le principe. Donc, oui, la voix est importante. Et ne dites jamais que vous avez une mauvaise voix. C’est peut-être juste parce qu’elle n’est pas placée. Parce que je connais des gens qui zozotent, qui ont les cheveux sur la langue, qui ont des voix nasillardes. et qui sont d’excellents orateurs sur scène avec un micro, qui font des choses extraordinaires. Ça part du qui vous voulez être, quel message vous voulez faire passer, puis comment vous allez faire en sorte de passer votre message et d’être vrai dans tout ce que vous dites.

 

N.G : Et alors, justement, tu as rejoint une association qui s’appelle l’ASMC, qui est l’Association des speakers et maîtres de cérémonie. Oui. Est-ce que tu peux nous présenter en quelques mots cette structure, du coup ?

 

V.L : Oui, bien sûr. Bien, je vais vous la présenter. Sur ce que je connais d’ailleurs, les élections viennent de se refaire il n’y a pas très longtemps. On a un nouveau président depuis peu. L’ASMC, c’est une association qui a démarré il n’y a pas si longtemps. Je crois que c’est 2006, je ne dis pas de bêtises. Ça fait quand même un petit bout de temps. Non, ce n’est pas… Bref. Et cette association-là, il y a environ 80 animateurs, maîtres de cérémonie, speakers, speakerines professionnels qui font partie du groupe. La majorité de ces personnes-là sont des speakers sportifs. Ça a démarré avec les pros qui cherchaient un moyen de pouvoir valoriser leur travail, être capables de pouvoir faire parler d’eux, être capables de réseauter, de s’organiser. Donc, ils ont monté cette association-là. Et on ne peut rentrer dans cette association-là que sur parrainage. Je ne peux pas envoyer un CV avec un chèque et dire je fais partie de l’association Non, au contraire, c’est parrainer. On va étudier ton pédigré, d’où tu viens, qu’est-ce que tu fais, où est-ce que tu as été. De là, tu vas rentrer. Moi, je ne suis pas le seul, mais je suis un des rares speakers à ne pas faire du tout d’animation sportive. J’en fais très peu. Je parle de façon récurrente. 

 

N.G : Presque pas parce que je crois qu’on t’a croisé sur la Coupe du monde de rugby.

 

V.L : Oui, c’est pour ça. Je m’attendais à ce que le lien se fasse. C’est qu’en effet, grâce à l’ASMC, et je les en remercie indéfiniment, et infiniment, pas indéfiniment, c’est infiniment, l’ASMC m’a permis de pouvoir vivre un événement majeur, soit être le speaker anglophone du stade de Toulouse avec mon collègue Johan Crozia, qui était la voix française. Et ensemble, on a fait les cinq matchs à Toulouse par la Coupe du monde en 2023. Un moment extraordinaire. Donc, l’ASMC est un moyen pour les speakers déjà de réseauter. Là, je sais que cette année, ils vont mettre en place des nouvelles formations, des moments d’échange. On a un bureau qu’on organise par année avec une réunion avec tous les speakers pour parler justement du métier. On parle de tarifs, on parle de mise en avant. Je veux pas dire que c’est un syndicat des animateurs, mais c’est un moyen pour les professionnels de pouvoir échanger, discuter, moi, ça m’a donné l’occasion de travailler sur mes tarifs. Ça m’a donné l’occasion de travailler sur, parr exemple, de vraiment me rendre compte que l’animation sur un événement international comme la Coupe du monde, c’est fantastique. Par contre, moi, mon personnage ne cadre pas avec l’animation sportive, stade. Et je connais des gens qui n’avaient peut-être pas idée qu’ils pouvaient aller aussi loin, on va dire, dans l’animation sportive et qui, aujourd’hui, animent des clubs, de très beaux clubs. Donc, c’est une association que je recommande chaudement. Et ce qu’il faut, c’est déjà prendre contact et voir si vous connaissez un animateur, de là, voir un peu comment ça fonctionne. Puis par parrainage, si vous rentrez, je vous garantis, c’est une belle association.

 

N.G : Alors, tu nous parlais de voix. Moi, j’identifie en fait dans un bon speaker à la fois une part de travail et aussi probablement une part un peu de talent intrinsèque. On a tous des talents différents, mais il faut avoir un certain talent aussi, malgré tout, pour être à l’aise. Comment est-ce qu’aujourd’hui, en 2024, pour quelqu’un qui nous écoute, comment est-ce qu’on peut se former finalement à ce métier-là ? La marche paraît haute entre je suis dans ma chambre, j’ai envie d’être speaker et je suis à Toulouse ou je suis au Stade de France devant des dizaines de milliers de personnes. Quelles sont aujourd’hui les formations qui sont possibles ? Comment est-ce qu’on progresse et qu’on évolue dans ce métier-là pour monter un petit peu ?

 

V.L : J’ai envie de dire, on est dans une époque où on a la possibilité de se former de façon extrêmement facile. Moi, à mon époque, il n’y en avait pas de formation, du moins. Moi, je viens du nord du Québec. Je n’ai jamais entendu parler d’une formation prise de parole en public. Il y en avait probablement, mais je veux dire. J’ai 51 ans aujourd’hui. C’était pas mon truc. Je me suis formé sur le temps. À mon sens, aujourd’hui, on a, avec tout ce qui est réseaux sociaux, justement les podcasts, mais comme on fait aujourd’hui, la facilité que la communication… On dit que la technologie permet pour pouvoir créer des moments de communication. J’ai envie de dire à quelqu’un qui a envie d’essayer de devenir, ou qui a envie de devenir un MC, c’est déjà de savoir qu’est-ce qui vous intéresse. Est-ce que vous voulez faire de la télé ? Est-ce que vous voulez faire de la radio ? Est-ce que vous voulez animer des stades ? Est-ce que vous voulez animer, je ne sais pas moi, chez Carrefour, r ayon Saucisson, c’est de l’animation aussi, de l’animation commerciale, d’animation de team building, d’activité comme on fait chez Zen. Qu’est-ce que vous avez envie de faire ? Ça, c’est déjà une première chose. De ne pas se limiter. Parce que ce n’est pas parce qu’on a envie de faire de l’animation de stade qu’on va faire un stade demain. Ça, il faut être très clair, à moins d’être vraiment bien pistonné. Et il faut rester très terre-à-terre. Première chose, être capable de s’écouter parler. Ça, c’est la première chose. Se former, ça veut dire quoi ? Ce qu’on fait aujourd’hui. Peut-être avoir un podcast, être capable de parler face à une caméra. Le meilleur exercice aujourd’hui, c’est de parler face à une caméra. Aujourd’hui, tout le monde a un smartphone dans la poche. Tu le mets sur un trépied et tu fais de l’animation, puis tu te regardes après. Si t’aimes, t’aimes pas.

 

N.G : Ça, c’est pas simple.

 

V.L : Je veux dire, il y a rien de plus puissant que ça. Te regarder en animation. Ça, c’est le premier truc. Après, il y a plein d’écoles de formation qui proposent ça aujourd’hui. Si vous allez sur Google, vous tapez formation prise de parole en public. Il y en a pléthore. Le truc, c’est quen je ne dis pas qu’il y a de mauvais formateurs ou quoi ou qu’est-ce. Je vais simplement dire, si vous voulez faire une prise de parole en public et que vous allez voir un institut de formation qui propose de former des gens à prendre la parole en public pour faire des conférences ou faire des séminaires ou des formations, ça ne sera pas de l’animation de stade.

 

N.G : C’est ça. Est-ce que la prise de parole en public, ça peut être dans mon entreprise, devant dix personnes, ça, c’est la prise de parole en public.

 

V.L : À partir du moment où on parle à quelqu’un.

 

N.G : Voilà. Mais être MC, au sens vraiment du littéral du maître de cérémonie, c’est au-delà de la prise de parole en public. C’est d’être capable d’animer, d’emmener les gens derrière soi, de présenter. Donc, effectivement, on va aller presque d’un métier d’animateur à un métier de journaliste en fonction du moment, en fonction de l’événement. Ça va au-delà de la simple prise de parole en public. Oui.

 

V.L : Tu me prends de court, je vais lister rapidement. La personne qui parle dans un micro, mais qui parle devant un public, parce qu’avec ou sans micro. Il y en a qui vont se dire, parler dans un micro, j’aime pas, parce que j’aime pas ma voix. Sachez que le son qui sort de l’enceinte quand vous parlez au micro, c’est votre voix. À moins que l’enceinte soit pourrie, mais c’est vraiment votre voix. C’est pas celle que vous entendez quand vous parlez, parce que quand vous parlez, votre voix sort par votre boîte crânienne qui a résonné, donc c’est pas tout à fait la même résonance, donc c’est pas le même son. Donc, votre voix, habituez-vous, c’est la vôtre. Ça, c’est le premier truc. Au-delà de ça, faire une formation pour devenir MC comme moi, mon métier aujourd’hui, que je fais depuis 35 ans, il y a beaucoup d’animations qui se font sur le terrain. Faire de l’improvisation, faire du théâtre, être capable d’apprendre à respirer, à parler, être capable de lire à voix haute. La radio. La radio, pour moi, c’est le plus extraordinaire des médias pour apprendre à parler en public. Pourquoi ? Parce que quand on parle, là, on est face à face, toi et moi, aujourd’hui. On se parle, on fait podcast, c’est génial. Tu me poses des questions, je réponds, c’est génial. Mais prenez-vous un instant pour parler tout seul d’un sujet qui vous tient à cœur. Parce que quand vous êtes sur une scène avec un micro, si vous n’êtes pas capable de faire passer l’émotion, les gens, ça va décrocher en 15 secondes. Garder l’attention des gens. Être capable de, quand je faisais le stade de Toulouse, j’ai un flash. C’est comment être capable de faire chanter We will rock you à 31 000 personnes dans un stade, alors que les gens ne te voient pas. Prenez l’exemple d’aller dans un centre commercial, e t il y a un animateur qui annonce une promo au rayon des petites culottes ou des soutifs ou des saucissons ou du fromage, est-ce que vous l’écoutez ? Est-ce que sa voix vous attire ? Est-ce que le message vous porte ? Parce qu’on est tellement, tellement, tellement sursollicité par tout ce qui se passe autour de nous aujourd’hui que si vous arrivez à capter l’attention parce que vous vendez des saucissons chez But, pas chez But, chez Super U. J’avais Super U en tête. J’ai dit But, donc chez Super U, chez Intermarché, chez Auchan ou quoi que ce soit. Mais dites-vous que là, vous pouvez attirer l’attention de n’importe qui. Mais ça commence pas nécessairement au micro. Ça commence juste à être capable d’interpeller quelqu’un dans la rue. Le meilleur animateur, tu sais c’est qui pour moi ? C’est le mec ou la nana qui est sur le trottoir à Paris puis qui essaie de t’arrêter pour te vendre un livre d’une association X ou Y avec son chasuble le vert de Médecins sans frontières ou quoi que ce soit. Pour moi, ça, c’est le truc le plus compliqué qui existe. D’ailleurs, c’est un exercice que je fais faire, moi, en formation de prise de parole en public. Être capable d’attirer l’attention de quelqu’un en quelques secondes et lui faire passer un message. Si tu réussis à faire ça avec une personne, sans qu’elle t’ait rien demandé, le jour où tu vas être sur scène avec un micro, tu vas avoir un impact incroyable. Et surtout, rester soi-même. Le MC, pour être bien formé devrait, si j’avais à te dessiner un parcours tout de suite, chercher peut-être à participer à des événements où il y a un petit peu de public, avec ou sans micro. Prendre la parole, quelques instants, ne serait-ce qu’une intro. Bonsoir à tous, bienvenue. Aller sur Google, chercher un icebreaker, faire participer les gens, une petite animation qui dure deux minutes, trois minutes, juste pour attirer l’attention des gens, voir comment on ressent la chose. Et après ça, commencer à mettre des sujets. Le côté journalistique, c’est être capable de pouvoir s’informer du sujet puis de poser des questions pertinentes comme tu fais aujourd’hui. Parce que tu m’as appelé pour me dire où est-ce que je peux trouver des informations pour pouvoir te poser des questions. Donc ça, c’est la deuxième phase. Puis après ça, une fois qu’on maîtrise ces éléments-là, l’on se lance sur des animations, que ce soit des mariages, des anniversaires, que ce soit avec des enfants, avec des ados, des adultes, faire du team building, faire des interviews radio, n’importe quoi, aussitôt qu’il y a un public. Trouve un moyen de vous mettre en avant, tout en mettant en avant les personnes qui sont là. C’est toujours important. Et de là, à mon sens, vous allez arriver à quelque chose de très, très efficace. Et vous allez surtout savoir si vous voulez faire ça ou pas. Parce que ce n’est pas le tout de vouloir être devant 30 000 personnes pour animer. Il faut vraiment aimer ça. Vraiment.

 

N.G : Et alors, je vais te demander un petit tip. C’est parce que je viens de venir sur un événement que j’ai vécu cette année. J’étais en régie sur un événement qui était organisé par une agence. Et on avait une chef de projet, qui est d’ailleurs une excellente chef de projet au demeurant, mais qui s’est retrouvée le matin de l’événement à devoir prendre la parole devant à peu près 200 personnes, qui étaient uniquement des membres du staff. Ce n’était même pas les clients qui n’étaient pas encore arrivés. Le site était encore fermé. Et en fait, elle était sur scène. Il y avait des intérimaires qui ne la connaissaient pas, qu’elle ne connaissait pas. Il n’y avait pas de…

 

V.L : C’est un message à passer.

 

N.G : C’était juste un message. Elle avait des compagnes de logistique.Et en fait, elle qui était parfaitement organisée, qui menait vraiment l’événement de main de maître. Elle s’est décomposée et elle est même descendue de la scène en larmes finalement, parce que se retrouver à devoir prendre un micro sur scène devant 200 personnes qui étaient juste des gens du staff, ils étaient juste bienveillants, ils attendaient juste les messages d’information pour pouvoir aller chacun sur son poste et se mettre en action, ça l’a terrorisé. Et en fait, elle n’a pas réussi. Alors d’autres membres de l’équipe ont pris le relais et le message est passé. Mais pour des gens comme ça, qui, comme elles, sont à la fois très performantes et à la fois ont pris une charge émotionnelle tellement puissante à ce moment-là de devoir prendre la parole devant 100, 200, mais des fois juste 10 personnes, quel peut-être petit tips tu pourrais nous conseiller ? 

 

V.L : La première chose que je dirais à une personne qui doit prendre les paroles devant un public, c’est de rester soi-même, c’est de ne pas essayer de jouer un rôle. Je l’ai dit tout à l’heure, mais je vais insister sur ce point-là parce qu’il y a beaucoup de gens qui… La pire chose qui peut arriver à quelqu’un, moi, je l’ai vécue dans une formation que j’ai faite en communication avec des animateurs télé au Québec à l’époque. J’avais 19 ans. On nous avait mis un dossier où je devenais un commentateur sportif, moi qui ne regarde absolument pas le sport à la télé. Je me suis planté, mais vautré monumentalement. C’est que j’ai essayé de jouer un personnage.  Et je me suis vautré parce que j’ai essayé de jouer un personnage. Donc, déjà, rester naturel. Partir du principe que quand vous montez sur une scène, il n’y a personne qui prendra votre place. Jamais. Parce que même un autre animateur prendrait votre place parce que si la personne est professionnelle, je parle d’un MC pro qui se retrouve dans une situation, qui voit quelqu’un qui est décontenancé, il viendrait relayer la personne, mais pas lui enlever le micro. Donc, ça, c’est un autre truc. Donc, soyez naturel, n’ayez pas peur. Non, ce n’est pas n’ayez pas peur. C’est normal d’être nerveux. Le track, comme disait Woody Allen, c’est le respect du public. Si vous n’avez pas le track, c’est parce que quelque part, vous n’avez pas d’affaires. C’est normal d’avoir le trac. Même moi aujourd’hui, je me retrouve dans n’importe quelle situation, que ce soit en spectacle, en animation, à MC ou quoi que ce soit, j’ai toujours cette petite étincelle. C’est même important de faire la perdre.Non, non, c’est important, puis il faut l’alimenter. Il faut l’alimenter. Première chose à faire, être prêt. Quand je dis prêt, ça veut dire si tu maîtrises ton sujet. Là, je parle pour quelqu’un qui n’est pas habitué. Attention, quelqu’un qui n’est pas habitué. Si tu maîtrises ton sujet, que tu dois faire passer des informations, contente-toi de livrer le message que tu as à livrer. Tu n’es pas là pour faire une conférence, un spectacle. Fais simplement dire ce que tu as à dire. Les gens vont écouter. Et s’ils n’écoutent pas, ce n’est pas ton problème. Toi, tu es là pour livrer un message. La plus grande difficulté, en tout cas, une des plus grandes difficultés pour moi, des personnes qui n’ont jamais pris la parole en public et qui se retrouvent face à une situation où ils sont obligés d’aller dire « Excusez-moi, on a un problème technique », par exemple. Là, tu parlais, c’est de demander au staff, mais imagine que c’est pendant un événement, il y a un problème technique et quelqu’un doit monter sur scène pour dire au public que, encore moins facile, parce qu’il y a une responsabilité. Restez honnête. N’essayez pas d’inventer quoi que ce soit. Allez à l’essentiel. Et rappelez-vous toujours que les gens qui sont dans la salle, ou dans l’assemblée, ne prendraient pas votre place à aucun instant parce que c’est pas facile de monter sur une scène. Les gens se disent Ouais, c’est super facile Non, non, non, c’est pas facile. C’est un métier. C’est un vrai, vrai, vrai métier. Si vous n’êtes pas habitué, si ça ne vous intéresse pas, et que vous êtes obligé d’y aller, prenez-vous des notes, marquez des trucs sur votre téléphone, écrivez ça sur un bout de papier ou quoi que ce soit. N’écoutez pas ce que vous dites dans le micro, faites juste lire vos notes. Allez à l’essentiel, juste à l’essentiel. Et surtout, pratiquer. Un truc que je dis à tout le monde, même les pros, avant de monter sur scène, faites des power positions. Je ne sais pas si tu… Ça te dire rien normal et pas à l’église et je sais pas ce que c’est tu dans la nature si tu regardes un gorille qui vient de faire un combat puis que gagner qu’est ce qui fait il est libre dans les airs c’est tu voyais bon bleu tant qu’ils bombent le sort pas exactement il bombe le torse lève les bras tu vois il monte la tête et tout ça un lion qui rugit qui monte sa puissance il fait quoi il se met il bombe le torse il lève la tête puis va il va rugir puissamment ça c’est mécanique dans le corps et pour l’instant tout ce qui est ces respirations diaphragme ne pas se rebaisser soi plutôt bien sur ses appuis. La power position, c’est une des techniques qui est très connue, c’est la position de Superman. Deux minutes avant de monter sur scène, vous forcez un sourire sur votre visage. Mais quand je dis forcer votre sourire, bon, là, on est filmé, on va surtout nous entendre.

 

N.G : Il y a des images de Mathieu derrière.

 

V.L : Il y a des images de Mathieu. Donc, pour ceux qui verront les images, c’est forcer son sourire. Forcer le sourire à fond, monter les zygomatiques à fond et tenir ça pendant 15, 20, 30 secondes. Et pourquoi ? Parce que mécaniquement, ça va déclencher le cocktail des anges dans le cerveau. Endorphine, dopamine, sérotonine, tout va bien. Ça monte. Ça, c’est parfait. Ensuite, mettre ses pieds dans le sol, les bras. Moi, à chaque fois que je monte sur scène, toujours, je lève la tête parce qu’il est impossible d’avoir des idées noires si tu lèves la tête vers le ciel et tu mets un sourire sur ton visage. Mécaniquement, on ne peut pas être malheureux. J’ai envie de te dire, voilà, souris, lève la tête, puis pense au truc le plus nul de la planète, tu vas voir que ça va tout de suite être désamorcé. C’est mécanique. Ce n’est même pas une question d’état d’esprit, c’est vraiment de la mécanique pure. Donc, lever la tête, sourire, forcer, mettre les épaules en arrière, bomber le torse, prendre des grandes inspirations, tendre les bras vers l’arrière et montrer cette position de puissance et la garder, la forcer pendant 30 secondes, une minute, on dit même jusqu’à deux minutes. Et qu’est-ce qui se passe ? Donc, mécaniquement, ça déclenche dans le cerveau tout ce cocktail des anges. Et quand vous allez monter sur scène, de façon complètement naturelle et mécanique, votre physiologie va être positive. C’est-à-dire que les gens qui vont vous regarder vont tout de suite vous faire confiance. Parce qu’il faut savoir qu’on a deux secondes pour faire une première bonne impression. Et que ce n’est pas possible de revenir en arrière. Donc, si tu arrives avec les épaules recrugliées, que tu n’es pas certain de toi, que tu as le souffle coupé, que tu ne sais pas, que tu n’es pas à l’aise, mais quand tu montes sur scène, même si les gens, entre guillemets, ne vont pas te manger tout cru, ils vont te manger tout cru parce que tu vas te mettre à avoir des idées noires, tu vas te mettre à penser que ça ne va pas bien, ça ne va pas bien. Non, si tu lèves la tête, si tu souris, si tu y vas, tu y vas en conquérant. Et quand tu montes sur scène, tu relaxes. Et naturellement les gens vont te faire confiance instantanément et de l’autre gagne Tu as déjà gagné 50 de ta salle. Tu n’as pas prononcé un mot et tu es gagnant. En faisant ça, c’est pour moi les différents éléments. Donc, préparez vos affaires, faites une power position, mettez-vous dans un coin, respirez, regardez la tête vers le ciel. Et si vous êtes nerveux, dites-vous, Woody Allen l’a dit, c’est le respect du public. Donc, ça veut dire que vous voulez bien faire et livrer votre message. Et vous allez vite découvrir qu’on a toujours cette image de quelqu’un qui nous lance des tomates. Moi, j’ai 35 ans d’expérience derrière moi. En 35 ans, je me suis planté plusieurs fois. J’ai pris des bâches. Je le dis, j’en ai pris des bâches, parce que j’ai fait des trucs qui ont, je pensais qu’ils fonctionneraient, que ça n’a pas fonctionné. En 35 ans, je n’ai jamais reçu une tomate pourrie. Donc, oubliez ça. Et dites-vous une chose, c’est que si vous êtes vraiment, vraiment, vraiment pas bon, mais là, vraiment, un calvaire pas possible, il n’y a personne qui va envoyer votre photo sur Twitter en disant cette personne-là est nulle Ça n’existe pas. Les gens vont vous oublier au bout de dix secondes. Ils ont d’autres choses à penser. On est dans un système où tout va très vite. Donc, vous pouvez monter très vite en haut, vous pouvez descendre très vite en bas. Et quand vous descendez, vous n’existez plus. Donc, la prochaine fois, on ne saura même pas que c’est vous qui avez planté le truc. Donc, vous n’embêtez pas avec ça.

 

N.G : Alors, merci Vincent pour toutes ces infos. On va se faire une dernière petite question.

 

V.L : Vas-y.

 

N.G : Et ce coup-ci, on va faire parler un petit peu avenir et prospective. Alors, je sais que c’est un sujet, toi, qui te passionne au-delà de ton métier de MC. C’est l’intelligence artificielle.

 

V.L : Oui.

 

N.G : Il y a encore quelques jours OpenAI annonçait la sortie d’un outil qui s’appelle Sora, qui permet de faire de la vidéo en intelligence artificielle. Est-ce que tu penses que l’intelligence artificielle va remplacer les MC dans les années qui viennent ?

 

V.L : Non, l’intelligence artificielle ne remplacera pas les MC. Sur de l’événement, il n’y a rien qui peut remplacer un être humain. Rien. Parce qu’on a cette sensibilité, une intelligence artificielle, le terme le dit. C’est une machine qui en réalité n’est pas intelligente, qui essaie de reproduire ce que l’être humain fait. Je ne sais pas si tu as eu l’occasion de tester le GPT Voice.

 

N.G : Non, pas encore. J’ai écouté des tests, mais je n’ai pas eu l’occasion de le tester moi-même.

 

V.L : C’est extrêmement impressionnant. Parce que quand tu discutes avec la machine, tu as l’impression de parler avec quelqu’un. Parce que même dans les intonations.

 

N.G : Les intonations, les pausesC’est phénoménale.Elle va mettre justement de l’émotion, en tout cas, on perçoit de l’émotion dans sa voix.

 

V.L : Donc, sur des métiers comme de la réponse téléphonique, des choses comme ça, sur des JT, voilà. Pourquoi pas ! OK, on pourrait arriver à avoir quelque chose qui puisse… voilà. Dans un événement, quel qu’il soit pour moi, une IA ne pourra jamais, en tout cas, aujourd’hui, je ne vois pas comment une IA pourrait prendre la place d’un MC. Et ceci dit, pour moi, l’IA est un outil indispensable pour les MC. Vraiment indispensable. Parce que je l’utilise depuis plusieurs mois maintenant. C’est ma nouvelle lubie. Je suis à fond là-dessus. Je travaille beaucoup, beaucoup avec tous les outils possibles et imaginables dans tous les styles, que ce soit la vidéo, du son, l’audio, l’image. Bref, j’en passe, des meilleurs. Et aujourd’hui, ça me fait sauver un temps phénoménal pour que je puisse me concentrer sur mon travail, qui est la prise de parole en public. Être capable de parler avec les gens. Donc, quand je vais, par exemple, j’ai fait un événement avant hier. J’ai fait un événement où j’avais des questions à faire, puis le client ne m’avait pas envoyé tous les éléments au départ, puis c’était long à traiter, puis il fallait que je note, et c’était dans 20 minutes. Bref, tu vois, c’est un peu l’usine à gaz. Tu te retrouves dans une situation où tu ne sais plus trop où aller, et tu te retrouves, OK. Et là, tu commences la nervosité commence à monter, et c’est là où on parlait des power positions, la respiration, ces choses-là. Moi ça fait 35 ans, je fais ça. J’improvise très, très bien. Tu me donnes un micro, un public, un sujet, je me débrouillerai toujours à faire le truc. Ça sera pas parfait, mais je vais le faire. Mais quelqu’un qui ne maîtrise pas, l’IA va lui sauver la vie. Pourquoi ? Parce que tu prends une IA comme Claude aujourd’hui, le client a trois bouts de notes comme toi, t’as tes feuilles sur la table, je prends mes deux trucs en photo, je demande à l’IA de me générer 10 questions pertinentes par rapport au sujet qui est là-dessus. Je n’ai pas lu le sujet. Lui, il l’a lu, lui a pris la pertinence, il va me générer des questions et là, j’ai mon outil, je suis capable d’animer tout de suite. J’ai pas besoin d’attendre. Quand j’ai fait la Coupe du monde de rugby, j’ai utilisé l’IA pour avoir des informations sur les clubs, sur les joueurs, sur les règles du rugby, sur des choses où j’aurais pu googler, mais que ça m’aurait pris des… c’est du traitement, il faut aller faire de l’analyse. J’ai pas le temps. Donc, il fallait que j’aille vite. Donc, rapidement, l’IA me permettait de… Autre truc, j’ai animé une Coupe du monde de rugby européenne à la Sorbonne. c’était en octobre et bêtement, du rugby à 7, le tableau d’affichage était HS. Donc, je ne pouvais pas voir les scores. Je ne connais pas toutes les règles du rugby à 7, bref, je ne suis pas un professionnel. Ils m’ont demandé de faire l’animation. Et comment je peux tenir les scores ? Comment je peux gérer mon truc ? Grâce à une IA, en live, j’ai demandé à me programmer un tableau de scores que je pouvais avoir sur mon téléphone et qui me permettait de faire le suivi de mes trucs et des pénalités et tout ça directement sur mon téléphone grâce à l’IA. Donc, remplacer non. Par contre, je suis non seulement convaincu, mais je suis un utilisateur et je le prêche à tous les jours. Je fais des démonstrations, j’explique aux gens. Cet outil-là est extraordinaire pour permettre aux MCs à devenir extrêmement performants dans une animation. Tu te retrouves sur un moment, cet été j’étais sur une scène et il y a un animateur, bref, on a eu un moment d’espèce d’appel d’air où la personne qui est supposée monter sur scène n’est pas là, et on ne peut pas faire autre chose, et on a 10 minutes à combler, qu’est-ce qu’on fait ? Ah bien là, 10 minutes, c’est super long. Un coup d’IA, boum, peux-tu me générer un quiz sur le cinéma des années 2000, blockbusters, machin, avec les choix de réponse. Pouf, le truc, il m’a sorti 20 questions, on a fait de l’animation pendant 10 minutes, et je n’avais pas besoin d’avoir d’autres outils avec moi. Et ça va vite, c’est efficace, et ça me permet de me stabiliser et de faire ce que moi je fais de mieux, parler dans un micro.

 

N.G : Merci beaucoup, Vincent.

 

V.L : Ça me fait plaisir. Merci pour l’invitation. Bravo à toute l’équipe. Bravo pour ce que tu fais. Comme d’habitude, tout est fantastique.

 

N.G : Avec grand plaisir. Si jamais vous voulez rentrer en contact avec Vincent, il a son site Internet, vincentleclerc.info. Vous aurez aussi le lien dans la description de ce podcast. Et surtout, pour terminer ce podcast, n’oubliez pas, dans l’événementiel, on n’a pas un métier facile, mais c’est quand même mieux que de travailler.

 

V.L : C’est clair.