Les coulisses des Jeux Olympiques

S01E01 – rencontre avec François Méchin

S01E01 – François Méchin : Jeux Olympiques, Coupes du Monde de Rugby et de Football

 

Un invité d’honneur !

 

Dans ce premier épisode, nous partons à la rencontre de François Méchin, qui partage son incroyable parcours en tant que Stadium Manager pour le Comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, son expérience sur les plus grands événements sportifs, Coupe du Monde de Football 1998, Coupe du monde de Rugby 2007 et 2023, Championnats du Monde d’Athlétisme et de Handball…

Transcription de l’épisode

 

N.G : Bonjour François, bienvenue. Tu es le premier invité de ce podcast, tu t’appelles François Méchin. Pour moi c’était très important que tu sois ce premier invité parce que tu as eu un rôle important au niveau des Jeux Olympiques, notamment sur la ville de Nantes. Est-ce que tu peux en quelques mots nous raconter quel était ton rôle aux Jeux Olympiques à Nantes ?

 

F.M : Oui, j’ai eu la chance effectivement de participer au J.O, ce qui était un rêve pour beaucoup de gens, mais moi en particulier, parce que j’ai un passé, on en parlera peut-être dans l’événementiel sportif, qui m’a mené assez naturellement à cette mission-là. En fait, ma mission, c’était de manager les opérations. Alors en soi, ça ne veut pas dire grand-chose. Les opérations, ce sont des choses qui se passent au stade et que au stade. Et ce sont un petit peu, on va dire, tous les aspects invisibles du projet qui font que quand on va siffler le coup d’envoi ou même un peu avant ça, allumer les lumières du stade, tout va se mettre en place et bien fonctionner. Donc aménagement, nettoyage, sécurité, les animations dans le stade, l’accueil des spectateurs, la gestion des médias, les relations avec la télé. Enfin voilà, il y a beaucoup de briques qui doivent bien s’emboîter pour que tout ça fonctionne parfaitement.

 

N.G : Ça fait beaucoup de sujets. Combien de temps en amont tu es rentré sur le projet des Jeux Olympiques ?

 

F.M : Alors je suis rentré indirectement sur le projet il y a déjà quelques années parce que dans la projection du projet, il y a le stade et il y a une partie de la base arrière qui est au parc des expositions, qui est en fait le lieu où je travaille habituellement. Donc sur le projet, j’y suis indirectement depuis au moins trois ans. Et puis c’est justement en mettant les pieds dedans, par ce biais-là notamment, et puis des relations que j’avais de mes anciennes missions dans l’événementiel sportif, qui m’ont amené à vraiment rentrer directement dans le vif du sujet en février 2024, c’est-à-dire à peu près six mois avant le début des hostilités ici.

 

N.G : Il faut dire que ce stade, tu le connais quand même vraiment bien. Alors, effectivement, on y reviendra. Tu travailles au parc des Expositions juste en face, mais je crois que tu as eu l’occasion d’intervenir sur plusieurs grands événements sportifs, à la Beaujoire aussi, par le passé.

 

F.M : Oui, c’est un peu là que je suis né, en fait professionnellement, parce que j’ai eu la chance de finir mes études en 97. Juste au moment où s’installaient les organisateurs de la Coupe du monde de football 98. Donc par le biais d’un stage, un peu par hasard pour le dire très honnêtement, parce qu’à l’époque il n’y avait pas de professionnalisation des métiers de l’événementiel sportif, il n’y avait pas déjà beaucoup d’historique, c’était un des premiers gros événements. Il y a eu Albertville en 92 qui avait beaucoup fait parler de lui en France, mais 98 c’est vraiment là que tout a commencé pour beaucoup de gens, beaucoup de gens d’ailleurs qui se sont retrouvés rassemblés aux Jeux Olympiques. Et moi j’y suis rentré sur une mission de gestion des équipes de bénévoles. Donc il y avait 1000 bénévoles à peu près à recruter, à intégrer, à former, à animer.

 

N.G : Sur la Beaujoire ? 

 

F.M : Sur la Beaujoire , oui.

 

N.G : Sachant qu’il y avait 10 sites en France déjà sur 98. 

 

F.M : Oui c’est ça je crois, 8 ou 10 sites, je ne sais plus. 

 

N.G : Ça fait pas mal de bénévoles au niveau national, mais 1000 déjà sur juste un stade.

 

F.M : 1000 sur un stade. A l’époque les bénévoles intervenaient sur davantage de choses qu’aujourd’hui, ça s’est un peu structuré. Donc ils étaient partout, il y avait des bénévoles à la logistique, à la restauration, enfin dans tous les domaines. Ce qui était en fait un biais idéal pour moi pour me plonger dans une organisation puisque j’avais des relations avec tous les managers opérationnels parce que je leur fournissais entre guillemets de la main d’oeuvre pour mener à bien leurs opérations. Donc c’était très intéressant, un peu par hasard, et c’est vraiment comme ça, par le biais un peu entre guillemets RH, organisation, recrutement, j’étais un peu une agence d’intérim interne, que j’ai commencé dans ce domaine là.

 

N.G : Et du coup, finalement, tu as continué derrière dans l’événementiel sportif et notamment les grands événements, puisque je crois que tu as enchaîné, alors pas forcément directement après, mais sur les championnats du monde d’athlétisme au Stade de France.

 

F.M : Oui, j’ai eu quelques étapes intermédiaires. J’ai bossé un peu dans les RH, un peu dans la continuité de 98, mais dans des entreprises classiques. Et puis, je me suis rapidement rendu compte que c’est vraiment ça qui m’intéressait. C’était l’événementiel sportif. Mais tu as raison d’ailleurs, parce que je mettais les trucs à l’envers. Derrière, c’est vraiment sur les championnats du monde d’athlètes que j’ai enquillé. Je suis Nantais, donc j’étais attaché à ma ville. Et à un moment, je me suis dit soit je reste ici et je ne ferai pas forcément ce que je veux en termes d’expérience. Soit je saute le pas, je vais à Paris. Donc je suis parti à Paris en 2002 pour bosser un an et demi, un peu plus d’un an et demi, sur l’organisation des championnats du monde d’athlétisme. Même sujet, gestion des bénévoles, mais à une échelle bien supérieur, parce que là on parlait de 4000 volontaires à recruter dans toute la France, à organiser, y compris la logistique, parce qu’il y a des gens qui venaient pas de Paris, enfin bref, il y avait des aspects que j’avais pas eu à gérer à Nantes. Donc de très forts volumes, une amplitude beaucoup plus longue, parce qu’un match de foot ça mobilise les gens une journée. À Nantes en 98 il y avait 5 ou 6 matchs, là on parle de 10-12 jours de compétition en continu, avec des amplitudes horaires. Vous avez peut-être vu ça sur le JO, il y a des épreuves qui s’enchaînent, ça commence le matin à 8h et ça se termine à 22h le soir. C’était un format beaucoup plus complexe à organiser.

 

N.G : Tous les sujets d’entraînement, de préparation pour l’ensemble des athlètes. 

 

F.M : Au Stade de France.

 

N.G : Au Stade de France, avec le terrain annexe qui est juste derrière. 

 

F.M : Avec le terrain annexe. Je pense à les plus beaux championnats du monde d’athlétisme qui n’ont jamais été organisés, parce que le stade était plein tout le temps. Beaucoup de Français qui étaient très forts à l’époque. Marc Raquil, je ne sais pas si tu te souviens, et son retour phénoménal dans sa ligne droite. C’était vraiment une expérience extraordinaire.

 

N.G : J’en doute pas, j’ai suivi ça moi de la télé, mais j’en garde de très bons souvenirs. 

 

F.M : Un championnat du monde d’athlètes, c’est un peu comme des JO ou une coupe du monde de foot, c’est une trentaine de pays. Et encore à l’époque, c’était même un peu moins que ça, c’était 24. Là, c’est le monde entier qui se déplace, donc il y a des athlètes de partout.

 

N.G : C’est cinq continents.

 

F.M : Ça crée une émulation, une ambiance encore très différente.

 

N.G : Avec cette fête, presque 200 pays qui sont représentés, les suiveurs de tous les pays.

 

F.M : Donc pas de regrets.

 

N.G : Pas de regrets.

 

F.M : Je suis parti à Paris et je me suis dit finalement, c’est pas mal.

 

N.G : Et finalement, après Paris, tu es parti sur le bateau ce coup-ci, sur l’America’s Cup.

 

F.M : En fait, tu connais ça mieux que moi. J’essaie de remettre les choses dans le bon ordre.

 

N.G : J’ai triché un peu, j’ai regardé ton profil sur LinkedIn !

 

F.G : J’ai eu la chance de m’impliquer dans l’organisation de la Coupe de l’América. En fait, pas de la Coupe de l’América, la vraie, mais les actes qui ont été organisées en préparation de la Coupe de l’América. La Coupe de l’América Valence 2007, c’était un projet global porté en plus par la ville de Valence avec des travaux énormes dans la ville pour faire un port, un très gros projet. Moi je ne suis pas allé jusqu’au bout, mais je vais t’expliquer pourquoi après. Mais j’ai participé aux actes Marseille et Valence en 2004. En fait c’était Alingui qui était organisateur de l’événement, qui était aussi un syndicat suisse qui a gagné la Coupe de l’América d’ailleurs.

 

N.G : Le tenant du titre, qui réorganise l’édition suivante.

 

F.M : Qui réorganise l’édition suivante. Et pour la première fois, ils avaient structuré une gestion des équipes de volontaires. Ce qui n’était pas forcément le cas avant. Donc là, avec mes deux expériences précédentes, carrément rentrer beaucoup plus tôt dans la conception du programme, l’écriture des fiches de poste, plus en mode consultant qu’en opérationnel de la gestion des bénévoles. Avec des plus petits effectifs, mais une discipline qui est un peu complexe. Il y a beaucoup de bénévoles qui étaient mobilisés sur l’eau. Donc ça, ça demande des compétences bien particulières. Ce n’est pas des gens que tu peux trouver comme ça un peu partout, comme c’est le cas sur une Coupe du Monde de foot. Ça attire plein de monde, c’est assez facile. Là, il a fallu aller chercher des compétences, ce qui était un peu différent.

 

N.G : Et une América’s Cup, c’est quelque chose qui est au long cours aussi. Donc il y a assez de durée finalement avec les bénévoles. Et tu dis que tu n’as pas été au bout de la Coupe de l’América.

 

F.M : Non. En fait, ça tient certainement à mes études, comme quoi, faire attention à ce qu’on fait quand on fait ses études et qu’on choisit les langues qu’on veut apprendre. J’avais appris l’allemand, mais pas l’espagnol. Valence, c’est en Espagne. J’ai eu en parallèle deux projets géniaux qui se sont dessinés. Il y avait donc continuer la Coupe de l’América à Valence et partir en Allemagne pour bosser sur la Coupe du Monde de football qui m’a été proposé par une ancienne bénévole de 98. qui avait pris du galon et qui était en fait à des postes de coordination important à la fédération allemande de football.

 

N.G : Donc là c’est la Coupe du Monde 2006.

 

F.M : 2006 oui ! Elle m’a appelé, elle me dit : « ça t’intéresse ? » Je dis : « bah écoute je sais pas, je vais voir! « , ça va être Valence ou une ville à définir en Allemagne, je savais pas encore où j’allais atterrir.

 

N.G : Faut bien choisir.

 

F.M : Faut bien choisir et puis finalement parce que je parlais allemand, je me suis dit allez j’y retourne. J’avais passé beaucoup de temps en Allemagne dans ma période d’études. J’en avais un très bon souvenir donc je suis retourné là-bas.

 

N.G : Donc tu avais vraiment un vrai niveau d’allemand aussi. Moi j’ai fait allemand à l’école mais j’ai pas de niveau d’allemand.

 

F.M : Ben non, c’est vrai que quand tu le pratiques pas tu le perds assez vite. Mais honnêtement, ça faisait longtemps que je ne l’avais pas parlé mais en deux mois là-bas c’était complètement revenu, j’étais bilingue.

 

N.G : Trilingue même du coup avec l’anglais j’imagine.

 

F.M : Avec l’anglais, ouais.

 

N.G : Et du coup, sur la Coupe du Monde, tu étais à nouveau sur ces sujets de recrutement ?

 

F.M : Alors, la Coupe du Monde, là, j’étais manager d’un site sur la gestion des bénévoles. Autant avant, j’étais chargé de mission, j’intervenais « sous la responsabilité de ». Là, j’étais autonome sur mon site et j’ai porté un programme des volontaires, à peu près la même chose que 98, 1000 volontaires à recruter.

 

N.G : Sur quelle ville c’était ?

 

F.M : Alors, je voulais être du côté de Cologne parce que je connais bien la ville. Et bon, mon amie a été sympa, mais pas complètement. Elle m’a positionné à Gelsenkirchen. Je ne sais pas si tu connais.

 

N.G : Oui, c’est Schalke 04.

 

F.M : Voilà, exactement. Que je ne connaissais pas. Alors, le club, c’est un club incroyable. Le stade est beau, magnifique. Vraiment incroyable. À l’époque, Schalke 04, c’était top 3 allemand. Au centre de formation, il y avait des joueurs comme Neuer, Goretzka, des joueurs vraiment top niveau. Et puis là, ils sont descendus en deuxième division, je crois. Mais à l’époque, c’était quelque chose d’assez important. J’étais même allé voir un match de Ligue des Champions avec eux à Milan, ils m’avaient invité quand j’étais là-bas. C’était vraiment un très haut niveau de football. Et puis très structuré en fait. Rien à voir, sans vouloir critiquer les clubs français, mais l’Allemagne c’est quand même un échelon au-dessus en termes de tout, de stade, d’organisation, d’accessibilité, de transport. Il y a plein de choses que j’ai vues là-bas que je n’avais jamais vues en France en termes d’orgas.

 

N.G : On a souvent fait la comparaison d’ailleurs entre la Coupe du Monde 98 et la Coupe du Monde 2006, avec le boulot qui a été fait sur les stades Allemand, qui permettait de plus créer des stades modernes finalement, avec des espaces réceptifs, tout ça, qui n’ont pas forcément été intégrés dans les travaux pour 98.

 

F.M : Non, en 98, c’était un peu tôt. Je pense que c’était trop tôt. La génération de stades est arrivée après en fait, elle est arrivée pour l’Euro 2016. Mais en 98, je crois que la Beaujoire, pour te situer le truc, c’était le stade de Nantes, c’était le deuxième stade le plus récent du paysage, après le Stade de France. Tous les autres stades étaient plus anciens finalement.

 

N.G : C’est un stade de 84, la Beaujoire.

 

F.M : C’est un stade de 84, c’était pas déjà un stade très récent à l’époque.

 

N.G : Il était fait pour l’Euro 84, donc on peut imaginer effectivement que la prise en compte des sujets techniques, électriques et ainsi de suite, ce n’était pas du tout les mêmes sujets.

 

F.M : Non, non, pas intégrés. Après, ce qu’on appelle les hospitalités, donc le fait d’acheter des places avec prestations par les entreprises par exemple, c’est très répandu en Allemagne. C’est beaucoup moins le cas en France. Alors maintenant, ça s’est développé de façon importante, mais à l’époque, c’était pas du tout aussi développé. En Allemagne, il y a carrément des salles géantes de banquets qui sont montées, y compris d’ailleurs avec des populations mixtes, entreprises, grands publics. Les joueurs, une fois le match terminé, ils viennent dans la salle, ils s’assoient à une table, ils mangent avec les invités. C’est vraiment culturellement assez différent.

 

N.G : Donc là on est en 2006 et finalement en 2007 tu reviens sur Nantes et je crois que c’est là qu’on se rencontre.

 

F.M : C’est en 2006 et la France va de nouveau en finale. Je me dis que j’ai du bol, je fais 98, je vois la France en finale et j’ai revu la finale de 2006 qui s’est un peu moins bien passée.

 

N.G : Ce petit coup de tête qui restera dans l’histoire.

 

F.M : Je n’ai peut-être pas dit mon dernier mot.

 

N.G : Il y en aura d’autres. Et du coup nous on se rencontre l’année d’après en fait pour la première fois, on se rencontre en 2007 parce que tu reviens à Nantes.

 

F.M : Je reviens à Nantes.

 

N.G : Et que moi je suis un peu en retard sur toi parce que je sors de mes études à ce moment-là et on se retrouve sur la Coupe du Monde de rugby à Nantes à la Beaujoire.

 

F.M : Je reviens à Nantes pour des raisons personnelles parce que j’ai 35 ans j’ai mon amie qui est installée ici et on projette d’autres choses tous les deux donc effectivement je reviens ici en 2007 je sais qu’il y a la Coupe du Monde de rugby. Avec l’expérience que j’ai, je mets le pied dedans relativement facilement. J’avais quelques contacts, notamment des championnats du monde d’athlétisme qui étaient aux manettes au niveau national. Et je reviens, mais par contre pas sur les mêmes missions. Comme tu as bien compris, j’ai fait beaucoup de missions liées à l’organisation humaine volontaire des sites. Là, je bascule sur une mission de coordination, enfin d’adjoint du directeur de site. Donc là, je commence à toucher à plein d’autres sujets, y compris des sujets techniques, un peu politique ou organisationnel, collectivité locale, sécurité, que je ne touchais pas forcément avant. Donc c’était super intéressant. C’est de nouveau au stade de la Beaujoire, donc je connaissais bien le site. Par contre, je me suis formé et j’ai appris plein d’autres choses sur d’autres typologies de métiers à cette occasion.

 

N.G : Un très bel événement.

 

F.M : Et effectivement, on s’est rencontrés cette année-là.

 

N.G : Moi, j’étais volontaire à l’époque. On s’est rencontrés là, un très bel événement, une grosse ferveur. Moi, pour le coup, c’était mon premier grand événement sportif au sens organisationnel, puisque en 1998, j’étais adolescent, j’étais dans les tribunes. J’ai vraiment bien aimé, mais là, toucher un peu du doigt à l’organisation, c’est quand même quelque chose qui m’a animé aussi. D’ailleurs, c’est pour ça que j’ai construit de mon côté aussi ma carrière. Et puis, suite à ça, finalement, tu vas traverser la rue, tu vas intégrer le Parc des Expos de l’autre côté, avec quasiment toute l’équipe d’ailleurs de Nantes, une bonne partie de l’équipe qui va se retrouver tous ensemble ici au Parc des Expos.

 

F.M : Il y a une petite partie de l’équipe, mais oui, de la tête de l’organisation de la Coupe du Monde de Rugby. Et à commencer par le directeur de site, Frédéric Jouët, à l’époque qui était directeur du site pour le compte de l’organisateur, qui à l’issue de sa mission, vient au Parc des Expos. Puis quelques mois après, il me propose de le rejoindre parce que lui, prenant en main son poste, il a besoin d’organiser, de structurer, notamment toute la partie un peu technique et organisationnelle du Parc.

 

N.G : Et là, tu changes de métier ?

 

F.M : Alors je commence vraiment sur des missions très techniques, ce qui m’a permis d’apprendre le site, ce qui est la base en fait, c’est ce que j’ai compris, la maîtrise d’un site, par exemple d’un stade, c’est essentiel, c’est le truc qu’il faut commencer par faire quand on veut s’imprégner et puis bien comprendre comment gérer les flux, comment être efficace dans son boulot. Et ensuite je me suis un peu orienté vers la partie développement pour attirer des organisateurs d’événements sur le site et notamment toutes les parties budget, devis, prestations, donc la construction de prestations un peu globale qui n’était pas gérée au niveau des sites sur les gros événements auxquels j’ai participé avant, qui était gérée par une direction financière en général centralisée. Et là, moi, j’avais la main sur ma société de sécurité, la société de nettoyage, les agenceurs d’espaces, le son, la lumière, enfin toutes ces prestations-là. Donc j’ai fait beaucoup de configurations ici dans les halls d’expo. Ce qui est intéressant, c’est que ce sont des espaces complètement vides. Donc il faut tout créer. Et je suis arrivé au bon moment parce que justement à ce moment-là, le parc des expositions a investi dans un nouvel espace qui s’appelle le Hall XXL, que les Nantais connaissent bien parce que c’est celui qui accueille régulièrement le HBCN.

 

N.G : Exactement, des grands salons et puis le HBCN notamment qui tous les hivers vient jouer trois matchs.

 

F.M : Oui, trois ou plus.

 

N.G : En doublant ou presque triplant sa capacité de spectateur par rapport à sa salle habituelle. 

 

F.M : C’est ça. Donc moi j’arrive en 2009. La délégation de services publics, DSP comme on l’appelle, arrivait à échéance pour le parc fin 2011. Donc il a fallu d’abord projeter le futur du parc, qui est né dans l’imagination des architectes et puis l’un autre aussi, le Hall XXL. Et puis après, le Hall XXL dont la vocation était d’accueillir ces événements sportifs, il fallait bien projeter les installations à l’intérieur pour pouvoir les transformer en aréna temporaire. Et en fait c’est là-dessus surtout que j’ai travaillé avec mon bagage technique comme je te disais que j’ai un peu acquis surtout à la Coupe du Monde du rugby et au Parc. Donc on a commencé à rentrer dans des conceptions de tribunes, de dispositifs d’éclairage et de sonorisation type spectacle, de vestiaires, d’espaces pour le grand public, d’espaces VIP, d’espaces médias, toutes les composantes de l’organisation d’un événement sportif. Il a fallu les créer à partir de rien dans le XXL, de façon temporaire, avec des contraintes de montage, de planning. que tu connais, puisque tu connais bien l’événementiel. Et ça, ça m’a occupé plusieurs années, jusqu’à la livraison du Hall XXL, ça c’est en 2013. Donc là on a les murs. Et puis pour inaugurer l’événement et démontrer notre capacité à faire, on a projeté tout de suite un événement unique qui restera dans les annales du H et puis du Parc et dans mon esprit aussi, c’est un moment marquant. C’est l’organisation d’un match du H contre le PSG, un seul, on avait fait ça que pour un match, en décembre 2013, qui s’est soldé par la victoire du H d’un point. Alors à l’époque, le H n’était pas aussi fort qu’aujourd’hui, donc c’était une forme d’exploit qui a lancé l’aventure en fait.

 

N.G : Et avec une récurrence maintenant le H, on est presque plus surpris, même si c’est une grosse logistique parce que ça mobilise le hall sur quasiment trois semaines, entre le temps de montage, l’exploitation, les trois matchs, et puis le démontage à chaque fois qu’on passe en configuration, par exemple handball, c’est une grosse période quand même ?

 

F.M : Oui, c’est un peu une des contraintes du hall. Ce n’est pas une salle qui est complètement configurée, dans laquelle on tourne la clé pour allumer la lumière et on peut directement s’entraîner. Il faut tout construire. Ça prend 10-12 jours. Après l’exploitation, selon le nombre de matchs, ça tourne. Et on démonte en 6 jours, entre 6 et 8 jours, on va dire.

 

N.G : Et en 2017, on a pu prolonger le plaisir puisqu’on a accueilli ici, et je crois que tu étais encore aux manettes, les Championnats du Monde de handball, avec le site de Nantes qui a eu pas mal de matchs.

 

F.M : Oui, très rapidement ça arrive derrière, parce qu’on fait l’événement en 2013, dont je te parle, inaugural, on organise un autre événement en 2014-2015, et puis tout de suite derrière, la candidature de Nantes était dans les tuyaux pour accueillir les Championnats du Monde de handball et l’équipe de France, ce qui fait la différence en termes de tout, de dimensionnement, de la jauge, des espaces médias. Tout de suite, un gros challenge. À domicile, au Parc des Expos, avec mon expérience, on me propose le poste de directeur de site de l’événement. 14 matchs, plus de 100 000 spectateurs, 4 matchs de l’équipe de France, un bon gros truc. qui est vraiment l’aboutissement de tout ce que j’ai fait avant et puis spécifiquement du travail que j’ai fait de configuration du Hall XXL qu’on va exploiter vraiment et puis mettre en lumière pour de bon.

 

N.G : Ce qui est intéressant en plus, c’est que tu n’as pas la précarité de ces grands événements, parce que ces grands événements, généralement, les gens qui s’investissent, s’investissent à 120%. Et une fois que l’événement s’arrête, des fois, il y a un petit trou d’après. Et je pense que là, après les JO, il y en a un certain nombre qui sont dans ces sujets-là, parce qu’il y a eu des milliers de salariés autour des JO. Et derrière, tous retrouver du boulot, c’est un peu compliqué. Toi, le fait d’être internalisé finalement, détaché et puis revenir, ça te permet d’avoir aussi une continuité professionnelle et une sorte de stabilité.

 

F.M : Sérénité, c’est clair. C’est une des difficultés de ce métier, si tu veux rester dans une typologie de gros événements, parce que des événements sportifs, il y en a plein, il y en a tout le temps, après il y en a des gros, des moyens, des petits. Si tu t’es habitué, moi j’ai commencé par le luxe, Coupe du Monde de football, je ne veux pas critiquer d’autres formats d’événements, mais ce n’est pas la même chose que je ne vais pas en citer, comme ça je ne veux pas me faire des ennemis.

 

N.G : Une course à pied, une course de vélo, plus régionale, il y a des très beaux événements.

 

F.M : Tu peux rester là-dedans, et à un moment, tu es obligé de bouger.

 

N.G : À travers le monde même.

 

F.M : À travers le monde, tu es obligé d’être complètement mobile, de t’adapter, d’apprendre des langues des fois, on en a parlé tout à l’heure. Sinon, tu vas faire les choses quand ça te passe sous le nez, comme moi j’ai eu la chance de pouvoir le faire assez souvent d’ailleurs, mais tu vas pas forcément choisir tes événements. Après, il y en a pour tout le monde, mais c’est sûr que c’est une des contraintes.

 

N.G : D’ailleurs, par exemple, pour l’Euro, Nantes n’a pas été retenue cette fois-ci pour accueillir l’Euro de foot en France.

 

F.M : Je crois que Nantes n’a même pas candidaté, en fait.

 

N.G : Nantes n’a pas candidaté. En tout cas, ce coup-ci, le grand événement sportif du moment en 2016 n’est pas passé par Nantes. Et celui-ci, tu n’es pas dedans en termes d’organisation parce que tu es ici mobilisé au Parc dans le cadre de ton métier.

 

F.M : Je pense que sinon, effectivement, j’aurais été dedans d’une façon ou d’une autre. Après, moi, sur la période, j’avais donc cette mission de directeur de site sur les championnats du monde de handball. Juste derrière, on accueille l’Euro féminin de handball au parc. Alors moi, je n’ai pas d’implication dans l’organisation directement, mais je suis impliqué via le site. On accueille ensuite l’Euro 2019 de volley. Pareil, je ne suis pas directement impliqué, mais je suis site. Donc avec mon expérience de 2017, j’étais très lié à l’organisation. Ensuite, il y a le Covid. Ensuite, en 2022, on accueille le Championnat du Monde de BMX au Parc des Expos, qui est encore un format complètement différent en extérieur, avec d’autres contraintes, mais super intéressant. En 2023, on va en parler, il y a la Coupe du Monde de rugby, en 2024, il y a les JO. Quand tu fais le bilan de toutes ces années et la densité d’événements internationaux qu’il y a pu y avoir à Nantes sur les dix dernières années, c’est presque exceptionnel en fait.

 

N.G : Oui, même pour la France, pour Nantes.

 

F.M : Donc Nantes a raté l’Euro de foot. Mais on ne peut pas vraiment dire que Nantes a laissé passer le train de l’événementiel sportif. Alors je vais être un peu critique envers certaines autres collectivités, mais je pense que ton podcast, j’espère qu’il n’y a que des Nantais qui vont l’écouter.

 

N.G : J’espère pas !

 

F.M : Ça fait déjà pas mal de monde.

 

N.G : C’est vrai !

 

F.M : Mais tu vois, Nantes, par exemple, n’a pas eu l’euro, donc ne s’est pas payé un stade. Il y a des villes qui se sont payées un stade, Bordeaux par exemple, qui aujourd’hui ne sait pas forcément quoi en faire, parce que son équipe, pour des raisons financières a été rétrogradée. Donc moi je pense que la décision au final n’a pas été… C’est dommage de rater un gros événement comme ça mais le rapport entre guillemets investissement retombé d’image sur des événements que j’ai cités et un Euro qui est en 2016 qui est déjà il ya super longtemps et l’investissement financier de construction d’un stade franchement je…

 

N.G : Oui, parce qu’en dehors des aléas sportifs, même Bordeaux, Nice ont du mal à remplir. Même Nice, qui est quand même plutôt compétitif, ils ont du mal à remplir leur stade, qui n’est plus le stade de centre-ville, qui est un stade excentré. Et la Beaujoire n’est pas un stade de centre-ville, mais finalement, les Nantais sont habitués à venir jusqu’à La Beaujoire.

 

F.M : La Beaujoire a réussi à attraper la Coupe du Monde de rugby, les JO, en investissant dans le stade, mais sans commune mesure avec une construction de stade. Donc là, je pense quand même qu’il est arrivé (on en a parlé tout à l’heure avec ces espaces hospi) à une limite. Il ne sera plus forcément dans le paysage dans les années à venir parce qu’il y a eu aussi beaucoup de stades qui ont été construits. Mais on n’a pas loupé tout le train des événements qui se sont déroulés ces dernières années en France. Et la métropole n’a pas un stade de plusieurs centaines de millions d’euros à rembourser pour autant. La stratégie n’est pas mauvaise du tout, de mon point de vue.

 

N.G : Je suis assez d’accord avec ça. Du coup, effectivement, on arrive en 2023. À nouveau, tu vas être détaché sur l’organisation. Et là, tu prends encore plus en main l’organisation parce que tu as tout ton passé. Il y a un lien parce que même les équipes salariées de la Coupe du Monde à Nantes sont basées avec les bureaux dans le Parc en face. Il y a une connexion entre les deux et tu es un peu le trait d’union entre les deux.

 

F.M : Oui, j’ai fait l’union au début parce que je basculais du Parc vers le stade, mais j’ai volontairement bien coupé le cordon. Très vite, pour ne pas mélanger les choses, il y a un de mes adjoints ici qui avait pris en main toute la partie Parc, et moi j’étais détaché au stade pour le compte de l’organisateur de la Coupe du Monde de rugby, comme Stadium Manager, c’est le terme qui est utilisé maintenant, pour en gros décrire les missions de manager des opérations, ce que j’ai fait ensuite au JO, pratiquement au même format.

 

N.G : Et on peut dire que tu étais sur un organigramme un peu le numéro 2 finalement à la Beaujoire de toute l’organisation, c’était Claire Jouët qui était la directrice de site. Et toi du coup, un stadium manager, tu étais non pas son adjoint, mais son numéro 2. Vous vous répartissiez l’organisation.

 

F.M : Oui, on était très complémentaires, ce qui était très agréable à travailler. Elle avait vraiment, elle, la mission de relation avec les collectivités, les autorités locales, préfecture par exemple, l’organisation interne, la fédération, enfin la World Rugby. qui sont les entités un peu donneurs d’ordres sur l’événement. Et puis moi, j’avais entre guillemets les mains libres sur le déploiement opérationnel de toutes les typologies de population dont on a parlé tout à l’heure, médias, télé, grand public, équipes, il ne faut pas oublier les équipes, sur le site. Donc j’étais très libre de mes mouvements, on était dans le même bureau, on était en relation permanente, mais on avait effectivement chacun notre précaré. Ça a très bien fonctionné.

 

N.G : Et l’organisation de l’événement, on ne l’a pas dit, mais finalement, quand on parle des Jeux Olympiques, il y a eu des énormes craintes pendant tout l’amont. Mais moi-même, je me demandais d’où viennent toutes ces craintes. Alors, il y avait cette histoire de finale de Ligue des Champions organisée un peu au dernier moment. Mais quand on voit tous ces événements sportifs dont on vient de parler, qui sont tous finalement des succès à tout point de vue, succès de fréquentation, succès d’image, succès sécuritaire, succès sportif. Voilà, encore un succès pour la France et pour toutes les équipes qui ont contribué à ce succès, finalement, à l’organisation.

 

F.M : Ouais, je suis d’accord avec toi. Tu vois, moi, je retiens une chose, ce qui est souvent, ça paraît anecdotique, mais les événements, effectivement, à Nantes, en tout cas, je pense, partout d’ailleurs, ils se sont très bien passés. Il y a quand même souvent des choses que tu ne maîtrises pas, qui font partie intégrante de la réussite de l’événement. Je vais te citer, par exemple, la météo. C’est idiot, mais les matchs de la Coupe du Monde de rugby à Nantes, les 4 matchs. Il a fait un temps radieux, c’était des matchs en journée, les gens sont venus un peu plus tôt, ils ont passé un super moment, la bière a coulé à flot, les Irlandais sont super sympas, ils ont gagné. Bref, tu vois, c’est des choses comme ça aussi où des fois tu as un peu de chance. Tu te dis, voilà, j’ai tout mis en place, en plus il fait super beau, ça détend tout le monde, tout est fluide. Alors je ne dis pas qu’il n’y a pas eu de difficulté mais… Donc les JO, c’est un peu pareil. Les JO, il fait un temps un peu dégueulasse avant. Tout le monde a des craintes. Alors sur la sécurité, je pense qu’elle était vraiment justifiée.

 

N.G : Oui, bien sûr. 

 

F.M : Parce que le contexte est quand même assez particulier. Et on a vu la déception des organisateurs quand il a plu sur la cérémonie d’ouverture, ce qui finalement n’a pas été si grave que ça, parce que c’était que la cérémonie d’ouverture. Par contre, après, pendant 15 jours, il fait un temps de dingue. Il fait un temps de dingue, il ne fait pas non plus… Parce qu’une des autres craintes, c’était par exemple qu’il passe 45 degrés.

 

N.G : Qu’on reporte des épreuves parce qu’il fait trop chaud, que les athlètes sont en danger.

 

F.M : Il n’a pas fait, je ne sais même pas s’il y a eu une goutte de pluie. Il n’a jamais fait plus de 35 degrés. C’est un scénario idéal.

 

N.G : Il y a eu quelques gouttes de pluie.

 

F.M : Il y a eu peut-être eu quelques gouttes de pluie, mais ce n’était pas méchant. Mais scénario idéal pour le pari qui a été fait de dire on va mettre toutes les épreuves en plein air, en extérieur, dans le centre-ville. Parce que mine de rien, il fallait quand même oser le faire. Donc, tu as tout un tas de facteurs, la bonne organisation, mais ça en général, maintenant, c’est suffisamment professionnel pour que tu arrives quand même à un résultat à peu près correct. L’enjeu de sécurité qui a été pris sur les JO, en tout cas de façon très sérieuse par les autorités, je pense, on l’a vu à Paris.

 

N.G : Oui, moi j’étais sur Paris, effectivement, c’était assez incroyable. Je suis arrivé quelques jours avant le début des JO sur Paris, quand on disait qu’il y avait un policier à chaque coin de rue. Ce n’était pas une image. Il y avait vraiment… Et je finissais tard, je rentrais la nuit. À deux heures du mat’, il y avait un policier à chaque coin de rue. C’était assez fou.

 

F.M : Donc les craintes, elles étaient justifiées pour moi. Ces craintes météorologiques, par exemple, ces craintes de sécurité, ces craintes de l’organisation, parce que c’était le niveau auquel les organisateurs s’étaient mis était quand même super haut. Ils n’avaient pas dit, on va faire des choix de JO, mais de toute façon, les JO, ça marche toujours. Ils avaient carrément mis la barre, surtout la flamme, c’était déjà comme ça sur pratiquement tous les sujets, ils avaient mis la barre au taquet.

 

N.G : C’était vraiment, on veut faire mieux que tout ce qui a été fait, du point de vue, et avec beaucoup d’ambition et beaucoup de questions, parce que quand c’est jamais fait, la cérémonie a cristallisé un peu tout ça, de se dire, est-ce qu’on n’est pas trop fous de vouloir faire une cérémonie sur la Seine ? Alors effectivement, même pour le coup, la météo n’a pas été au rendez-vous et finalement, on s’en sort pas trop mal, malgré cette météo assez catastrophique.

 

F.M : Imagine juste qu’il y ait eu du soleil et que derrière le tableau qui a été présenté, il y ait un coucher de soleil sur les toits de Paris. Là, je pense que tout le monde aurait dit incroyable. Pas de chance, c’est pas très grave. Mais tu vois ce que je veux dire, il y a des impondérables des fois qui rendent le truc exceptionnel au lieu qu’il soit bien. C’est ça que je veux dire. La base, et d’ailleurs c’est une des caractéristiques de ces événements-là, c’est que tu dois tout prévoir, tout organiser, mais tu dois surtout, et c’est une grosse partie du temps, prévoir ce que tu ne peux pas prévoir, et te préparer à ce que tu ne peux pas prévoir. Parce que là, sur Nantes, on a eu de la chance, par exemple, sur les deux événements, il n’y a pas eu d’événement majeur à gérer, mais ça peut toujours arriver. Et dans ces cas-là, l’organisation est jugée beaucoup sur la capacité à gérer cette espèce de truc ingérable.

 

N.G : Je ne sais pas si on peut en parler, mais sur la Coupe du Monde de rugby, dans les éléments imprévus qui arrivent, on a eu des soucis électriques sur le premier match.

 

F.M : Effectivement, des difficultés électriques sur le premier match qui ont occasionné quelques coupures sans vraiment de gravité qui auraient pu devenir compliquées à gérer. Sur le moment, quand tu es en train de gérer ce genre de truc, tu es un peu inquiet. Maintenant, les équipes du stade sont professionnels, ils ont identifié le problème tout de suite, il a été traité en quelques minutes, donc il n’y a eu aucune conséquence à tout ça. Mais quand tu es en situation de stress, de préparation, d’organisation, ça peut vite prendre des proportions beaucoup plus importantes que ce que le fond du problème. Donc il faut savoir se préparer à ces difficultés et surtout se préparer à pas faire n’importe quoi quand il y a une difficulté. Et ça c’est valable pour tous les sujets de l’organisation. Des fois, en voulant régler un problème, on en crée trois. Et du coup, on se retrouve avec plus de problèmes mal gérés que le problème initial.

 

N.G : Ça fait écho à ce que tu disais de bien connaître son lieu, bien connaître ses équipes et savoir qui sera le bon interlocuteur au bon moment, à quel endroit il peut se passer ceci, où est-ce qu’il faut intervenir ?

 

F.M : Puis structurer sa chaîne de commandement. Ça, c’est super important. C’est pour ça qu’il y a sur ces gros événements, tu as toujours un centre de commandement qui est complètement déconnecté, même à l’aveugle de tout, qui se contente d’être en communication avec les managers et de prendre les messages, les analyser, prioriser les réactions en fonction de la difficulté rencontrée et puis de faire remonter les difficultés majeures s’il y a des décisions à prendre qui sont à prendre à un niveau différent que celui de l’organisation. Ça peut être par exemple la préfecture qui décide d’évacuer un stade. Pour une alerte à la bombe par exemple, ce qui n’est heureusement pas arrivé. Entre une poubelle qui déborde et ça, il y a évidemment des différences de réaction qui sont importantes.

 

N.G : Mais oui, effectivement, le centre de commandement, vous étiez bien caché sous les tribunes, vraiment pas dans les bureaux les plus sexy de la Beaujoire. Et en même temps, voilà, on était en lien avec vous à la fois sur certains sujets. Moi, j’étais sur la partie compétition, on vous remontait des infos, ne serait-ce que l’heure précise à la seconde près du début du match que vous relayez ensuite à l’ensemble des équipes. Et puis de la même façon, on recevait,, des informations de votre part sur certains sujets au fur et à mesure de l’avant, du match ou de l’après-midi ?

 

F.M : Oui, un déroulé, ça s’appelle techniquement, ils appellent ça souvent sur les événements une runsheet. Mais c’est un document Excel bête avec des colonnes et je ne sais pas, il doit y avoir 500 lignes qui déroulent toutes les opérations minute par minute dans un jour de match. Pour être sûr de rien avoir à louper, de pouvoir réajuster des horaires s’il y a un décalage, par exemple, de l’arrivée d’une équipe. Il y a des choses qui sont très impactantes, comme ça, par exemple, l’arrivée d’une équipe. Voir le coup d’envoi, là, c’est carrément beaucoup plus impactant. Heureusement, ça n’arrive pas souvent. Et ça se densifie. La journée commence assez tranquillement. On parle en dizaines de minutes. Quand on arrive avant le match, on est en seconde.

 

N.G : On est en seconde et effectivement, il y a tout, sortie des vestiaires, alignement des équipes, entrées sur le terrain, première hymne, deuxième hymne, et ainsi de suite. Et minuté à la seconde près avec des hymnes qui ne font pas la même longueur. Donc le runsheet ne va pas être la même d’un match sur l’autre parce qu’il faut anticiper, il y a un Haka, il n’y a pas un Haka. Tout ça c’est sur mesure.

 

F.M : Tu vois, sur je ne sais plus quel match, de la Coupe du Monde de rugby, on a eu un problème de runsheet. Je pense une erreur de manipulation. Et tout de suite, on a été en difficulté parce qu’on était en décalage. Alors ça n’a pas duré très longtemps parce qu’on avait une sauvegarde et qu’on a pu identifier. Enfin bref, il n’y a pas eu de conséquences. Mais on s’est rendu compte tout de suite que notre document n’était pas calé. On ne gère plus rien. Donc ça, c’est vraiment des documents essentiels.

 

N.G : Et du coup, la Coupe du Monde de rugby, les Jeux Olympiques, te revoilà de nouveau à 100% sur le Parc des Expos. Est-ce que tu peux nous dire aujourd’hui, on voit qu’il y a des salons qui s’installent, quel est ton quotidien, c’est quoi la journée, la semaine type de François au Parc des Expos ?

 

F.M : En fait, je suis directeur des opérations, un peu comme ce que je faisais au stade pour les grands événements, donc je vais gérer à peu près les mêmes périmètres. Il y a les bâtiments, l’entretien des bâtiments, la réglementation, la sécurité du public, la sécurité incendie, le nettoyage. Moi je gère une équipe qui pilote tout ça et plein d’autres choses. Comme j’étais un peu absent ces derniers mois parce que j’étais sur les gros événements, l’équipe est très efficace, elle s’organise et elle tourne bien. Je suis un peu moins aujourd’hui sur l’exploitation parce qu’il y a un gros projet qui se profile. C’est celui du rapprochement de la Cité des Congrès et du Parc des Expositions, à horizon 1er janvier 2026, qui va être un gros changement pour le parc. Donc moi je suis très mobilisé sur ces sujets-là, c’est-à-dire l’imbrication des deux organisations, des process, pour que tout ça, ça fonctionne et puis qu’on arrive à aligner un peu nos modes opératoires, même si les sites sont assez différents, même si on y fait des choses assez différentes. Donc c’est super intéressant. Parce que je me confronte à mes homologues de la Cité des Congrès pour comprendre comment ils fonctionnent. J’apprends plein de nouvelles façons de travailler, de nouvelles méthodes. Ils ont des priorités que nous, on n’a pas et vice versa. Donc, je vais être beaucoup dans la discussion, la compréhension de leur façon de travailler pour essayer de faire matcher tout ça. Donc, c’est passionnant.

 

N.G : Parce que deux lieux qui, même géographiquement, sont distants. Il y en a un qui est dans le centre-ville, l’autre qui est en périphérie. Deux équipes. Et à la fois, il va falloir que ces équipes travaillent ensemble, d’une certaine façon, tout en gardant les équipes sur chacun des deux lieux, parce qu’on ne peut pas mettre tout le monde au même endroit, sinon ça n’a pas de sens.

 

F.M : Non, et puis ils ont des éthéoriums avec du spectacle, des techniciens qui sont des techniciens de spectacle, nous on fait très peu de ça, alors peut-être qu’on va s’y mettre, mais pour l’instant on est plutôt sur des expositions, des événements qui ont besoin de surface, donc par exemple l’aréna dans le XXL, mais aussi des gros salons professionnels, des gros congrès, des choses avec une grosse logistique, mais un peu plus technique entre guillemets. que la cité sur ses aspects logistiques.

 

N.G : Et là, si on se concentre aujourd’hui sur les équipes du Parc, ça représente combien de personnes qui travaillent au Parc ?

 

F.M : Ça représente entre 35 et 40 personnes environ. La spécificité du parc, c’est qu’on organise nos propres événements. Donc il y a à peu près la moitié de l’équipe qui est dédiée aux événements traditionnels du Parc, qui sont essentiellement des salons. La Foire de Nantes, évidemment, même si c’est un événement qui est un peu ancien et qui marche peut-être un peu moins bien qu’à une époque. Serbotel, un gros salon des métiers de bouche. La convention Art2Play, le festival Art2Play manga, un gros festival qui rassemble 35 000 personnes sur deux jours.

 

N.G : C’est un énorme succès.

 

F.M : Salon d’habitat traditionnel, Creativa, tous ces événements sont produits par nous, donc organisés par nos équipes, ce qui demande un staff important. Et le reste des équipes, à peu près la moitié, ce sont la structure administrative, et puis mon équipe, ce qu’on appelle la production. Donc avec des chargés de production et puis des techniciens qui sont essentiellement des équipes de terrain.

 

N.G : Et qui vont répondre aux besoins des autres organisateurs qui vous réservent des espaces.

 

F.M : Alors que de tous les organisateurs, parce qu’on considère que nos collègues d’Expo Nantes sont des organisateurs d’événements internes. Donc nous en fait on maîtrise complètement notre site et on est en lien avec tous ces organisateurs internes et puis beaucoup externes pour faire en sorte que l’événement dans le site se passe le mieux possible.

 

N.G : Et on n’imagine pas forcément mais pour avoir l’occasion de venir régulièrement ici. Il y a les foires et salons grand public que tout un chacun connaît un petit peu. Il y a les événements sportifs dont on a parlé. Mais il y a aussi par exemple des foires et salons privés qui sont organisés. Par exemple, une enseigne de distribution va faire venir tous ses fournisseurs pour présenter les produits à tous les acheteurs ou les directeurs de magasins et ainsi de suite. Donc on a des salons privés qui sont vraiment interdits au grand public. On a aussi des événements de type congrès, séminaires. On va pouvoir mettre plusieurs milliers de personnes dans un même site, ce qu’on ne peut faire qu’ici finalement sur la région nantaise ?

 

F.M : Oui, tu n’as pas d’équivalent. En fait, c’est pratiquement 40 000 m² de surface couverte le parc des expositions. Donc il n’y a pas d’équivalent. Il faut aller à Rennes ou Bordeaux pour avoir des surfaces comme ça disponibles. Des fois, c’est incontournable. En fait, si tu veux faire un événement en Nantes, tu n’as pas le choix, tu es obligé de venir ici. Le site fait 21 hectares. Et la particularité quand même du parc des expos de Nantes, c’est qu’il est dans un endroit absolument superbe, le long de la rivière de l’Erdre, bordé par un parc floral sur un de ses côtés, très vert, parce qu’il avait inauguré le site initialement pour la venue des Floralies, donc ça c’était dans les années début 70, donc il est très atypique.

 

N.G : Et à la fois très bien desservi, transport en commun, accès voiture…

 

F.M : Accès véhicules, le long du périph, près de l’autoroute…

 

N.G : Parking mutualisé finalement avec le stade, donc ça aussi ça permet à la fois, le stade utilise les parkings du parc expo et le parc expo utilise les parkings du stade, donc ça permet d’avoir une grande surface de parking plutôt bien optimisée, donc ça répond à beaucoup de besoins d’organisateurs.

 

F.M : Seule contrainte avec nos amis du stade que je connais très bien parce que je passe du temps en face aussi. C’est vrai que quand il y a un match et un événement en même temps, des fois on se marche un peu sur les pieds on arrive toujours à discuter à s’organiser mais oui oui c’est intelligent de mutualiser les parkings quelques jours ou quelques soirs dans l’année ça peut frotter un peu mais ça va, on arrive toujours à s’entendre

 

N.G : Et du coup, en termes de staff, est-ce qu’il y a des recrutements régulièrement ? Est-ce que l’équipe est à peu près stabilisée en nombre de personnes ? Est-ce que c’est juste des remplacements ? Est-ce qu’il y a une croissance au niveau des…

 

F.M : Au parc, c’est assez stable. C’est pour ça que je t’ai dit entre 35 et 40 tout à l’heure, c’est bon an mal an, on est dans cette fourchette-là. Ça dépend de l’activité qui, elle, est très stable depuis, hormis le trou d’air du Covid en 2020, elle est très stable depuis que j’y ai mis les pieds en 2010.

 

N.G : On va se faire une dernière petite question, là, de tout ce qu’on a parcouru. C’est quoi l’anecdote que tu retiens un peu dans ton parcours, à la fois peut-être d’organisateur, mais aussi éventuellement juste de spectateur, puisque tu vas aussi te rendre sur d’autres événements à titre perso. Est-ce qu’il y a quelque chose qui t’a fait vibrer, dont tu te souviendras toute ta vie ?

 

F.M : Il y en a plein. Je peux en citer peut-être deux qui me viennent à l’esprit, mais le premier, pour répondre à la question sur l’événement, il ne faut pas que je reste avec ça, mais quand même, France 98. C’était mon premier boulot à l’époque, le FC Nantes, c’était Ouédec, Loco et compagnie. Moi j’étais fan de foot, me retrouver dans ce stade là à organiser des matchs alors que j’avais un peu plus d’une vingtaine d’années avec l’Espagne, le Brésil deux fois, le Maroc. Je m’étais retrouvé dans les tribunes à discuter avec Zico, je ne sais pas si tu connais Zico, un grand joueur brésilien. Je me suis demandé ce que j’étais en train de faire là, et j’ai mesuré. Ma chance, ainsi que de voir la finale de 98 un peu plus tard. Mais ouais, c’était vraiment incroyable. Vraiment incroyable, une aventure humaine. D’ailleurs, tous les gens qui l’ont vécu. Je pense que les JO qui viennent de se passer, pour les gens qui ont travaillé à Paris pendant 4-5 ans, ça va être à peu près pareil. Ils vont garder ça toute leur vie et ça sert aussi à ça, ces événements-là. Et d’ailleurs, pour faire le lien, la deuxième image qui me vient à l’esprit, c’est la fierté d’avoir participé aux JO, parce que c’est quand même incroyable. J’y ai participé parce que j’y ai travaillé, mais je me suis dit je vais quand même aller voir ce qui se passe à Paris. Donc le samedi, je ne sais plus, le 10 août je crois, à la fin de la compétition à Nantes, avec mes deux garçons, on est allé voir le beach-volley à Paris au pied de la Tour Eiffel sur la session de nuit, la dernière en fait. Avec les finales, le soleil se couche, la Tour Eiffel s’illumine, on était tous les trois, on se regardait et on se disait Waouh, là c’est un truc, je ne pensais pas voir ça un jour et c’est incroyable.

 

N.G : Ce stade était fou, l’ambiance, le bruit quand les gens tapent des pieds dans ces tribunes métalliques.

 

F.M : C’était dingue. Et là, tu as l’impression de vivre un truc que tu ne revivras certainement jamais, mais qui est en soit extraordinaire.

 

N.G : On ne te verra pas à Los Angeles ou dans les Alpes en 2030 ?

 

F.M : Los Angeles, non.

 

N.G : Même en tant que spectateur ?

 

F.M : Ouais, peut-être, parce que ma femme et mes enfants ont acheté des billets, ils ont passé quasiment une semaine à Paris, donc ils ont pris vraiment goût à ça. Peut-être de spectateurs, je n’en sais rien. Et puis mon fils passera son bac au même moment, donc je vais rester tranquille quelques années, je pense, le temps qu’il fasse ça. Mais non, quand je regarde les événements, quand je regarde le panorama des événements, je me dis, et je reviens sur ce que je disais tout à l’heure, je me dis qu’il faut vraiment que j’apprenne l’espagnol. Parce qu’il y a une Coupe du Monde de foot en 2030 en Espagne, Maroc, Portugal. Et je pense que si il y a un événement pour boucler la boucle qui me ferait vraiment rêver aujourd’hui, c’est celui-là.

 

N.G : On te le souhaite en tout cas. Merci François d’avoir pris le temps de nous raconter un peu tout ton parcours et puis d’avoir participé à ce premier podcast. J’espère que tu as passé un bon moment.

 

F.M : C’était très sympa. De revivre tous ces moments avec toi. Dont une partie qu’on a partagée, d’ailleurs.

 

N.G : Quelques-uns qu’on a partagé, donc les deux Coupes du Monde de rugby. Les JO, mais à distance, puisque moi, j’étais sur Paris, tu étais sur Nantes.

 

F.M : Non, mais tu as eu raison. Les JO, c’était bien à Paris.

 

N.G : Je m’étais vraiment dit que je voulais être sur Paris. Parce que j’adore le foot, mais… Dans mon imaginaire, les JO allaient quand même majoritairement se passer à Paris. Et j’avais envie d’être sur place.

 

F.M : Tu as eu complètement raison.

 

N.G : En tout cas, voilà, un grand merci. Et puis, on va terminer par cette petite citation. N’oubliez jamais, dans l’événementiel, on n’a pas un métier facile, mais c’est quand même mieux que de travailler.

 

F.M : Excellent, je la retiens.